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uniforme et facile à déplacer, après qu’on en avoit enlevé la pierre. Je rapporte la chose des deux façons, comme je l’ai ouï dire. On commença donc à poser ainsi les parties du sommet, puis les suivantes, et l’on finit par les parties inférieures et celles qui touchent le sol. »

On peut donc se former une idée fort juste de tout ce système et de tous ces procédés de construction. Sans doute, et surtout si l’on multiplie indéfiniment les rangs d’assises dans l’épaisseur de la pyramide, il y a lieu de s’étonner de la longueur du travail. Mais si l’on suppose qu’il n’y eut par-dessus la manœuvre du blocage, qu’un seul et unique rang d’assises de pierres en épaisseur, et lorsqu’on voit que chaque assise n’étoit formée que de pierres de deux à trois pieds d’épaisseur, de longueurs diverses et simplement équarries, on voit que tout ce travail pourroit s’évaluer par un simple toisé, et que pour en connoître la dépense, il ne s’agiroit que de connoître le prix de la journée des ouvriers que l’on y employa.

Nous avons appliqué à la construction même des assises par degrés, le procédé d’ascension des pierres que le texte d’Hérodote n’applique, dans le fait, qu’aux pierres du revêtement dont il nous reste à parler. Il faut remarquer effectivement, que, selon ses paroles, on les avoit posées à partir du sommet, ce qui ne peut avoir lieu ainsi, que pour la dernière enveloppe. Les assises par degrés ne purent être établies, au contraire qu’en procédant de bas en haut, et les mêmes machines furent nécessaires à l’érection de ces degrés.

La pyramide reçut donc, pour son achèvement, un dernier mode de construction, qui en devint le parement. Ce parement dut faire de ces quatre côtés quatre surfaces unies, et présenter autant de talus lisses et glissans. Ainsi fut-elle vue par Hérodote, comme le prouvent les derniers mots du passage qu’on a cité, desquels il résulte que le revêtement ne formoit plus de degrés, puisqu’il falloit le commenœr par en haut. Pline nous le donne également à entendre, lorsqu’il dit que, de son temps, il y avoit des gens assez adroits pour monter jusqu’au sommet de la grande pyramide, ce qui n’auroit eu rien d’extraordinaire, si le revêtement n’eût pas été lisse, et ce qui devenoit toutefois possible, vu la grande inclinaison des angles.

Hérodote, les récits tant des anciens que des nouveaux voyageurs, et les débris qu’on recueille encore au bas de la grande pyramide, attestent qu’elle fut revêtue d’une pierre plus précieuse qu’on donne pour du marbre blanc. Cette matière, rare en Egypte, se trouvoit, à ce qu’il paroît, assez abondamment sur les bords de la Mer Rouge, et pouvoit en trois jours être transportée en Egypte. Cette pierre qu’on appeloit arabique, quoique moins blanche que les marbres blancs qu’on exploite aujourd’hui, donnoit un fort beau poli et des blocs d’une assez grande étendue ; ceux qu’on employa au revêtement de la grande pyramide, avoient trente pieds de longueur, au dire d’Hérodote.

Si maintenant on se figure la pyramide bâtie en degrés de pierre ordinaire, avant le revêtement qui devoit donner à ses quatre faces une superficie toute lisse, on ne peut s’expliquer que de deux façons la manière dont on procéda à cette dernière construction. Ou ce fut en pierres taillées carrément sur chaque assise des degrés, ou ce fut par des pierres taillées en forme de prismes, remplissant l’angle rentrant, formé par deux de ces degrés. Dans le premier cas, il est facile de voir que ces pierres taillées carrément et posées de haut en bas sur chaque degré, auroient produit un degré de plus en saillie dans toute la longueur de la ligne inclinée des quatre faces rampantes.

On n’auroit pu, dans cette hypothèse, se procurer la superficie lisse des quatre faces rampantes, qu’en retranchant après coup, c’est-à-dire, après la pose, l’excédant de matière formé par la saillie de chaque degré, ce qui eût occasionné une perle considérable de temps et de matière, en exigeant un travail difficultueux à faire en place ou ce qu’on appelle sur le tas. Il paroît donc certain que le revêtissement de marbre fut formé de morceaux taillés en triangle à la mesura des degrés différens de hauteur, dont il falloit remplir l’intervalle d’angle en angle. Il suffisoit alors de tailler des blocs quadrangulaires et de les scier en deux, d’angle en angle. De-là économie de matière, de main-d’œuvre, de temps et de peine. C’est à monter de tels morceaux, que le texte d’Hérodote nous apprend que servoient les machines dont il parle.

L’économie dont nous venons de parler, fut encore plus nécessaire pour la construction du revêtement de la troisième pyramide de Gyzée, appelée de Mycerinus, qui beaucoup moins importante par la grandeur de sa masse, le fut bien davantage par le travail de son revêtement qu’on fit en granit.

La recherche des différens genres de travail, de matériaux et de main-d’œuvre des pyramides de la Basse-Egypte, seroit le sujet d’un ouvrage qui n’existe pas encore, et il suffira à cet article d’indiquer en peu de mots les notions principales qu’on trouve chez les voyageurs.

Il se pourroit que le plus ancien mode de construction eût consisté à envelopper une butte naturelle ou artificielle d’un parement de briques crues. Telles se présentent plusieurs des pyramides du Fayoum, Dans quelques-unes, l’éboulement de ces briques est arrivé à un tel point, que de loin on croit voir de simples monticules. Resteroit à savoir si cette enveloppe de briques crues recevoit un revêtissement qui en garantît la durée.

L’état de dégradation dans lequel nous sont