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d’où la chaleur sortoit, Pour Etre distribuée Dans differentes pièces.

PROPORTION, s. f. On entend généralement par ce mot, le rapport des grandeurs ou des poids, des quantités ou des nombres entr’eux, etc.

Le mot que les Grecs employaient pour exprimer le plus souvent cette idée, le mot Sun-metria, qui désigne très-bien la vertu de la proportion, laquelle est pour chaque chose, dans son ensemble, une correspondance de rapports qui fixe à chaque partie sa mesure.

De l’idée positive de proportion dans les œuvres de la nature, résulte, pour les ouvrages des arts, une idée de proportion morale, si l’on peut dire, plutôt que physique. Cette idée emporte avec soi celle de beauté de convenance etc. ; ce qui signifie que dans ces ouvrages, proportion exprime, non un simple rapport de grandeurs ou de quantités, mais le rapport le plus parfait, le plus agréabe de ces grandeurs et de leurs mesures entr’elles.

En effet, on se trompe fort souvent sur la véritable acception du mot proportion, dans les œuvres de l’architecture, mais surtout à l’égard des architectures étrangères au système de l’art des Grecs.

Si l’on se borne à entendre la proportion dans les ouvrages de l’homme, comme un simple rapport arithmétique de grandeurs, de distances, de quantités, il se trouvera toujours de cette proportion-là, même dans les objets, que l’idée ou la notion morale de proportion, nous fera être les plus disproportionnés.

Toute chose, quelle qu’elle soit, tout objet produit par le hasard, toute délinéation, même fortuite, a ses rapports, et il nous est impossible de concevoir quoi que ce soit de matériel, qui n’existe avec des rapports entre ses parties, rapports que le calcul ou le compas pourra déterminer. Chacun de ces objets, tels, par exemple, que des rochers, des montagnes, des escrescences produites par des causes inconnues, a certainement des rapports, mais ce sont plutôt des rapports de dimension, que des rapports de proportion.

L’idée de proportion renferme l’idée de rapports fixes, nécessaires, constamment les mêmes entre des parties qui ont une fin déterminée.

C’est particulièrement dans les êtres organisés, que nous découvrons la véritable proportion celle dont nous venons de définir l’idée ; et la proportion ou son principe acquiert de l’évidence dans chaque classe d’ètres, à mesure que chacune s’élève, selon l’ordre où la nature l’a placée, jusqu’à l’organisation du corps humain.

Aussi est-ce dans le corps de l’homme, que tous les arts vont puiser les leçons et les exemples, qui peuvent constituer, à des degrés différens, les lois de leurs proportions.


Il ne se pouvoit pas, en effet, que l’homme, chef-d’œuvre de la création, ne se servît pas de modèle à lui-même, dans les ouvrages qu’il veut assimiler à ceux du créateur. Cette vérité, ou si on l’aime mieux, ce fait, a été de tout temps la base de toutes les théories de l’architecture, partout où l’esprit de l’homme, arrivé par l’élude de la nature, au degré de culture qu’il comporte, a tenté de donner a ses productions l’empreinte de la raison universelle, et de l’ordre dont le créateur a placé le type dans ses œuvres.

On trouve chez tous les philosophes de l’antiquité, d’innombrables répétitions de cette vérité, et Vitruve, en la développant dans son Traité, n’a fait que reproduire une notion devenue déjà banale. Après avoir donné le détail de tous les rapports proportionnels qui existent entre toutes les parties du corps humain (lib. 3, cap. l) : « De même, dit-il, dans un édifice sacré, les membres dont se compose son architecture, doivent avoir leurs mesures en rapport avec la mesure de la totalité et avec celle de chacune des parties. Si la nature a composé le corps de l’homme, de manière que par leur proportion les membres correspondent à l’ensemble, les Anciens ont donc eu raison d’établir dans la confection de leurs ouvrages, la même correspondance, entre chaque partie et le tout. C’est pourquoi, comme dans tous leurs bâtimens ils employoient les ordres, ce fut principalement dans les temples des dieux qu’ils s’attachèrent à l’application de ce principe d’imitation. C’est encore du corps humain, qu’ils tirèrent les divisions et les noms des mesures, comme doigt, palme, coudée, etc. »

Vitruve, ainsi qu’on le voit par ce passage, n’est point l’auteur d’un système qui étoit bien antérieur à lui ; il n’a fait que le remarquer et en constater l’existence, comme un fait reconnu de tout le monde, et dont le principe étoit écrit dans tous les ouvrages de l’architecture grecque.

C’est encore ce fait, c’est le principe dont il se déduit, c’est l’application de ses conséquences, qui font la théorie, non pas seulement des proportions dans l’architecture grecque, mais de ce qu’est laproportion eu elle-même, relativement à cet art. Nous n’avons pas dessein, en effet, d’exposer ici minutieusement les rapports proportionnels de chacun des membres de chaque ordre, ni de chaque ordre dans son emploi, avec tout ce qui en dépend. Ces rapports sont l’objet particulier de tons les traités d’architecture, et bien qu’il se trouve plus d’une variété de mesure dans les règles partielles, dont chacun a pu former sa théorie, ces variétés n’infirment en rien la valeur du principe.

On sait que, même à l’égard de l’imitation du corps humain, les peintres et les sculpteurs, tant anciens que modernes, n’ont jamais regardé la règle des proportions, comme soumise à une exac-