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chitecture romaine que les niches donnent un caractère à cette architecture ; mais nous distinguerons deux espèces de niches, celles qui ne servent qu’à y placer des statues, et celles qui servent à différens usages, comme les exèdres, les renfoncemens plus ou moins grands, de forme carrée ou circulaire, qui se trouvent dans les murs d’une grande longueur. Les premières sont dans les temples, dans les salles, dans les basiliques, dans les entre-colonnemens des portiques, sur des murs lisses, mais doivent être généralement de la grandeur de six à sept pieds, afin d’y placer une statue grande comme nature, Elles sont prises dans les épaisseurs des murs, sont terminées par une plate-bande ou par une partie circulaire, quelquefois décorées de chambranles, de colonnes, de frontons et d’ornemens, selon leur place ou le rapport qu’elles ont avec l’architecture. Les autres niches sont vastes et descendent jusqu’au sol : elles servent à y placer des bancs, des sièges pour y réunir beaucoup de monde, comme on en voit dans les extrémités des basiliques, des églises, des tribunaux ; elles étoient appelées calcidiques, selon plusieurs commentateurs de Vitruve : les autres, placées dans les thermes, les salles de réunion, avoient la même forme, quoique moins grandes, et servoient à y placer des siéges pour les bains ou pour converser : on les appeloit exèdres. On peut encore appeler indistinctement calcidique, exèdre on niche, selon l’emploi, la forme et la décoration qu’on leur donne, ces renfoncemens qu’on voit plus particulièrement dans les édifices romains, et qui souvent sont répétés dans les enceintes de vastes édifices. Ces niches sont nécessaires à la construction et à la solidité de ces longs murs ; car, malgré la grande épaisseur qu’on leur donne ordinairement, ils ont besoin, de distance en distance, de certains points d’appui : souvent on y met des contre-forts ; mais lorsque la localité le permet, il est mieux de les remplacer par des ressauts agréablement disposés, qui servent a soutenir toute la volée du mur, qui, par son élévation et son étendue, sortiroit facilement de son à-plomb. C’est cette nécessité de former des ressauts pour la solidité des murs d’une grande étendue, qui est cause que tous les aqueducs romains ne sont jamais en ligne droite, ce qui a donné lieu à bien des conjectures. On a prétendu que c’étoit pour éviter certains courans qui se trouvoient sur son passage, ou que c’étoit afin de diminuer la rapidité de l’eau, ou pour chercher les lieux les plus élevés afin d’éviter la trop grande dépense. Il est vrai que cette dernière est souvent une des raisons ; mais la plus forte, et celle qu’on doit admettre avec le plus de probabilité c’est qu’un mur d’une aussi grande étendue, et souvent très-élevé, auroit été facilement renversé, soit par le tassement, soit par des tremblemens de terre, et que si une partie venoit à tomber, elle entraineroit bientôt, par son poids,


celle qui se trouve sur la même ligne. C’est donc pourquoi on a plié cette longue distance, en profitant effectivement des hauteurs qui pouvoient être favorables à la construction, dans les lieux où il falloit moins de fondation. Mais les diverses brisures des longs aqueducs romains sont nécessaires pour maintenir et fortifier le mur. Il n’est point jusqu’au plus simple des particuliers qui ne suive cette règle pour le paravent qui se trouve dans sa chambre pour le garantir du froid. C’est donc ce principe de solidité qui fit que les murs des Romains particulièrement, qui souvent n’otoient que de briques, avoient une infinité de renfoncemens, comme on le voit dans les enceintes des thermes.

Les niches servent encore dans la construction à ménager les matériaux, soit la pierre, soit les briques qu’on y emploie ; c’est encore une des raisons pour lesquelles les Romains en firent un si grand usage dans les énormes massifs de leurs constructions en brique. Elles servent encore dans certains cas, comme de décharge pour lier les murs et les différentes parties de muraille ; car, lorsque les murs ont une grande hauteur, il est essentiel de faire quelquefois sur la hauteur ce qu’on fait sur la largeur, c’est-à-dire, de former des arcades pour lier les murs, en rompant les assises régulières horizontales. On n’y met ordinairement que des plates-bandes ou des arcs ; mais lorsque le mur a une grande épaisseur, on peut y mettre des niches. Les niches servent encore de décharge dans les fondations, et butent les terres. On fait pour les murs de terrasse des contre-murs, ou on y place une suite de niches circulaires qui isolent les terres et empêchent lent poussée et leur humidité, comme on le voit au camp de la ville Adrienne.

Maintenant que nous avons donné une idée des niches en général, voyons comment les Anciens et les Modernes les ont employées. Il nous reste peu de niches des Grecs. Dans les temples, les statues étoient colossales et placées au fond de la cella, isolées comme au temple de Jupiter olympien et à celui de Minerve à Athènes. On voit cependant quelques niches à quelques édifices ; elles sont ordinairement carrées. Je n’en saurois citer de circulaires, les Romains en ont peu employé dans l’architecture qu’ils out empruntée des Grecs, comme dans les temples, par exemple, construits en marbre ; mais dans les grandes constructions en pierre, on peut citer celles de l’enceinte du temple de Mars vengeur : elles n’ont de grandeur que les dimensions suffisantes pour recevoir des statues grandes comme nature. Cette dimension est celle qui convient le plus aux édifices ; elle sert d’échelle, de comparaison pour établir les justes dimensions de l’édifice. Les niches de cette dimension ont été souvent, et avec profusion, répétées dans l’intérieur même des temples lorsqu’ils étoient en brique, comme