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POR POR

Au reste, les portiques, comme constructions de galeries couvertes, purent s’appliquer à une multitude d’usages, et dûrent faire partie d’un très-grand nombre d’édifices. Ainsi les agora ou marchés publics, eurent des portiques autour de leurs enceintes. Les théâtres et les stades ne furent autre chose que des composés de portiques.

A Rome, il paroît que le portique, tel qu’on l’a fait voir, comme lieu de promenade couverte, non-seulement trouva place dans les bâtimens des particuliers, mais devint, eu suivant les progrès du luxe, une partie nécessaire de l’habitation des grands et des riches.

Un peu avant Caton, les particuliers n’avoient point encore de portiques qui regardassent le septentrion, pour prendre le frais en été ; mais bientôt on ne vit plus, à Rome, de maison qui n’eût un promenoir en portiques. On en fit de diverses façons et dans toutes sortes d’expositions, pour changer de température. Ainsi nous avons vu au mot Crypto portique (voyez ce mot), qu’il y avoit de ces promenoirs pratiqués originairement sous terre, puis en forme de ce que nous appellerions grottes, et qu’enfin on donnoit simplement ce nom, comme Pline-le-Jeune le fait entendre, à un portique voûté et percé de fenêtres aux deux expositions contraires.

Vitruve et Columelle prescrivent la manière dont il falloit tourner les portiques, afin qu’ils pussent être fréquentés dans toutes les saisons. Voyez la description du Laurentum de Pline-le-Jeune, au mot Maison de campagne.

Il se construisit à Rome un nombre considérable de portiques, non plus comme objet d’agrément particulier, mais comme monumens publics, comme lieux de rendez-vous, ouverts à tous, comme dépôts d’ouvrages d’art, de livres, de curiosités, etc. On donne encore aujourd’hui à quelques ruines, à quelques restes de constructions et de colonnes, les noms de quelques-uns de ces édifices. Ainsi l’on croit que ce qui est maintenant à Rome le marché au poisson, est tu débris du portique de Mercure. On voit encore quelques restes des colonnes corinthiennes du célèbre portique d’Octavius, et l’on a employé dans la nef de l’église de Sainte-Marie, plusieurs belles colonnes de l’ancien portique d’Octavia, dont il existe quelques restes, entre l’église qu’on vient de nommer et celle de Saint-Nicolas. Sur l’emplacement du portique d’Antonin-le-Pieux, est à présent une maison d’orphelins. Il reste de l’ancien ouvrage onze belles colonnes cannelées. Le portique de Faustine, femme d’Antonin-le-Pieux, en face du Mont-Palatin, présente encore dix colonnes et une inscription sur son architrave.

On peut parcourir dans les Dictionnaires d’antiquité, les notions nombreuses qui constatent quel fut le nombre des portiques à Rome. Malheureusement ces notions, et il faut le dire aussi, les restes de constructions ou de colonnes qu’en croit avoir appartenu aux portiques, ne sauroient nous instruire ni de la disposition et du pian de ces édifices, ni de l’ensemble de leur élévation, ni du caractère qui en constituoit le genre. Il paroît en effet qu’on y employoit indifféremment les piédroits et les colonnes, et tous les ordres de colonnes.

Le mot portique, chez les Modernes, n’exprime pas aussi spécialement qu’il semble l’avoir fait souvent chez les Anciens, un genre d’édifice ou de monument à part, détaché de toute autre construction, ayant ses usages, ses propriétés et une destination particulière.

Il nous semble aussi que dans la langue actuelle de l’architecture, le mot portique représente à l’esprit une composition architecturale, plus particulièrement en arcades et en piédroits. On dira d’un bâtiment avant au dehors ou dans l’intérieur de sa cour de semblables arcades, qu’il est en portiques, et on opposera volontiers à ce mot, le mot colonnade, lorsque les galeries intérieures ou extérieures sont en colonnes. Ainsi, pour citer à Paris un exemple qui rende compte de l’emploi de ces deux mots, dans leur rapport avec les choses qu’ils expriment, on appelle colonnades, à la place Louis XV, les galeries supérieures des deux édifices qui décorent cette place, et l’on dit que ers colonnades s’élèvent sur un rang de portiques inférieurs, formant à rez-de-chaussée une galerie percée en arcades.

Considérant donc sous ce rapport le portique dans l’architecture moderne, nous dirons qu’on lui a affecté les mêmes variétés de proportion et d’ornement qu’aux portes (voyez ci-dessus Porte). En le composant d’une arcade de piédroits ornés de pilastres ou de colonnes, soit adossées, soit engagées, on distingue le portique dorique, le portique ionique et le portique corinthien.

L’usage du portique, dans l’architecture moderne, a dû devenir fréquent selon les pays, en raison de la nature dus matériaux. La difficulté de trouver des architraves d’un seul morceau de colonne à colonne, ou d’y suppléer par l’artifice des claveaux ou plates-bandes, avoit déjà, dans les bas temps de l’architecture antique, suggéré l’idée d’élever en briques des cintres sur les colonnes isolées. De là sans doute l’emploi des arcades, devenu depuis si général dans tous édifices, et surtout dans les constructions des vastes églises chrétiennes, qui exigent des supports solides pour lies masses des voûtes en matériaux destinées à leur servir de couverture.

Le plus grand nombre des églises modernes est ainsi construit en portiques, c’est-à-dire en arcades formées par des piédroits ornés de pilastres.

L’emploi des portiques, considérés comme galeries ou promenoirs, devint presque général dans les cours des grands palais. Rome moderne nous fait voir de ces portiques, tantôt en arcades supportées par une ou deux colonnes en place de

piédroits,