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POR POR


l’antiquité, les portes de ville, des arcs de triomphe avec lesquels leur masse a de la ressemblance, c’est le nombre de deux ouvertures ou arcades égales. Les monumens triomphaux nous présentent ou une seule arcade destinée au passage du triomphateur et de son cortège, ou une arcade plus grande, avec deux plus petites collatérales. Les entrées des villes dûrent exiger deux passages égaux, l’un destiné à l’entrée, l’autre à la sortie, et c’est là une de ces dispositions dictées par le besoin, qui établissent une distinction certaine entre des monumens qui, du reste, dûrent se ressembler. La porte qui subsiste encore à l’entrée de la ville de Pompeia ne fait point exception à cette règle, quoi qu’en disent quelques descriptions. Cette porte n’a, dans le fait, rien de monumental, et les deux ouvertures qui l’accompagnent, ne sont que de petites issues qui aboutissent à deux couloirs.

La distinction que l’on vient d’établir entre les portes de ville et les arcs de triomphe, n’empêche pas, sans doute, de croire que jadis aussi deux monumens aussi semblables, n’aient pu se confondre dans les emplois variés qu’une multitude de circonstances locales leur auront assignés. La cause la plus probable de cette confusion, aura été l’usage d’affecter la forme des arcs de triomphe, à certains monumens honorifiques érigés pour toute autre chose que des victoires. C’est ce que nous a prouvé l’arc de Pola (voyez Pola), servant aujourd’hui, et peut-être aussi jadis, de porte à cette ville.

L’idée d’arc, monument triomphal servant de porte, et de porte pouvant recevoir le même emploi honorifique, dut prêter encore plus à cette réciprocité d’usage chez les Modernes, où le mot triomphen’exprime plus que le résultat de la victoire, sans emporter l’idée d’aucune des pratiques usitées chez les Romains. Des monumens en forme d’arcs de triomphe se sont donc élevés dans presque toutes les contrées, et en l’honneur des princes ou des événemens les plus pacifiques. On citeroit ainsi beaucoup de portes de ville en divers pays, construites, disposées et ornées en manière d’arc de triomphe. Une des plus magnifiques est celle qu’on appelle, à Berlin, la porte de Brandebourg. A Florence, la porta a San Gallo est un très-bel arc de triomphe tout-à-fait dans le goût des Anciens, élevé au grand-duc François Ier., à l’occasion de son entrée dans sa capitale en 1739.

Paris eut pendant long-temps quelques-unes de ses portes formées en arcs de triomphe : telles étoient celles qu’on appeloit de Saint-Antoine et de Saint-Bernard, qui ont été détruites depuis quelques années. (Voyez Arc de triomphe. ) On appelle encore portes, comme ayant été situées à l’extrémité des rues Saint-Denis et Saint-Martin, et à la rencontre des boulevards, autrefois limites de la ville, des monumens dont nous avons donné la description à l’article qu’on vient de citer.

En général, toute porte de ville suppose une ville environnée de murs, et la plupart des villes murées l’ayant été en vue de la défense militaire, le plus grand nombre des portes dut être assujetti à des besoins qui s’accordèrent rarement avec ceux de l’art de l’architecture. Aussi, parmi les portes de villes antiques qui nous sont parvenues, citeroit-on peu d’ouvrages qu’on puisse proposer pour modèles. Des trente-sept portes que l’on comptoit à Rome, au temps de Pline, le plus grand nombre a disparu, et parmi celles que présente la Rome moderne, il y en a peu d’antiques, et peu encore de celles-ci, se font remarquer pour l’architecture.

On exceptera, cependant celle qu’on appelle aujourd’hui porta maggiore, jadis porta Nœvia et Labicana. Cette porte étoit le point où aboutissoient jadis et aboutissent encore aujourd’hui les aqueducs qui conduisoient à Rome l’eau Curtia et l’eau Cœrulea. Aussi se compose-t-elle d’un attique extrêmement haut, divisé en trois bandes, qui portent chacune l’inscription de chacun des Empereurs qui concoururent à ce grand travail. Deux grandes arcades supportent cet attique ; leur construction est en bossages, et leurs massifs ou piédroits sont occupés par des niches accompagnées de deux colonnes qui soutiennent un fronton.

Les portes des villes modernes dans le moyen âge et jusqu’au renouvellement des arts, soumises aux différens systèmes de fortification, ne nous présentent d’ailleurs d’autres formes que celles dont l’architecture appelée gothique avoit accrédité l’emploi, celle de l’arc aigu.

Lorsque le goût de l’architecture antique reparut, il n’y eut guère dans l’embellissement des portes de ville, d’autre style et d’autre système que ceux des portes appliquées jadis aux monumens publics. Telle fut cette porte qui sert d’entrée à Rome, sous le nom de porta del Popolo. Ornée de colonnes et de statues en dehors, sa façade intérieure a reçu une décoration nouvelle an temps de Bernin, et de son dessin à ce qu’on croit, pour l’entrée de la reine Christine à Rome. L’inscription qui pourroit se placer sur beaucoup d’autres entrées de ville est : Felici fausto q. ingressu.

Le genre de décoration, la proportion et le goût des portes qui donnent entrée dans les monumens publics, les temples, les palais, se coordonnent naturellement an goût, à la proportion et au style de décoration des divers ordres d’architecture.

Vitruve n’a eu en vue, en fixant la forme et l’ordonnance des portes, que celles des temples. Il en reconnoît trois genres : la porte dorique, la porte ionique et la porte qu’il nomme atticurge, et par ce mot, selon les commentateurs, on doit entendre un synonyme de corinthienne. (Voyez Atticurge.) Ces trois genres de portes sont toutes ce qu’on appelle à linteau. Leurs différences con-