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porte d’une église avec les ornemens qui l’accompagnent. On trouve dans d’autres, que le nom de portail se donne à l’entrée des palais et d’autres édifices.

Sans aucun doute, ce mot qui n’est qu’un augmentatif du mot porte, dut être employé fort anciennement à signifier les entrées principales des églises, des palais et des monumens publics. Comme laporte de tout édifice se présente ordinairement à sa façade principale, il a toujours été naturel d’y appliquer des accessoires qui la distinguent des portes ordinaires, dans les maisons des particuliers. Ainsi, la porte donna, chez les Anciens, son nom à l’ensemble dans lequel elle se trouva comprise. De-la le mot portique. De même dans les édifices sacrés ou profanes du moyen âge, qu’on connaît sous le nom de gothiques les entrées des monumens sirent partie de ces grands arcs aigus qui en composoient les frontispices, et qui recevoieut cette multitude de sculptures, de petites colonnes et ’emblêmes divers que chacun connoît. Il arriva donc que la porte donna aussi son nom à cet ensemble, et de proche en proche à la totalité de la composition architecturale et décorative du monument.

Depuis lors le mot portail, dans l’usage ordinaire, est resté affecté aux frontispices des églises. Quoiqu’il soit possible de l’appliquer encore aux façades des palais et des monumens civils, dont l’architecture se plaît à décorer les entrées avec plus de luxe et de magnificence, nous renverrons les notions de ce genre au mot PORTE (voyez ce mot). Nous ne prendrons ici le mot portail que sans l’acception de frontispice d’église.

On a déjà, en plus d’un endroit, fait remarquer la très-grande différence que la religion dut mettre entre les temples du paganisme, et les églises du christianisme. Le mot église seul l’indique et en donne la raison. Ecclesia, église, veut dire assemblée. Le culte payen ne réunissoit point ses adorateurs dans lintérieur des temples, par des pratiques et des cérémonies obligatoires. Le temple intérieur n’étoit que la demeure du dieu, c’est-à-dire, de sa statue ; le plus grand nombre des cérémonies et des sacrifices se pratiquoit en dehors. La société chrétienne demanda, dès l’origine, de grands espaces clos et intérieurs. La basilique fut l’édifice antique qui convint le mieux à ses usages. Ce fut à l’instar des basiliques que les premières églises furent construites, soit pour la forme, soit pour l’étendue.

Mais la basilique, ainsi qu’on peut s’en convaincre, et par les monumens et par les notions de Vitruve, exigeoit un intérieur très spacieux et une fort grande élévation, puisqu’il y avoit deux rangs de colonnes l’un au-dessus de l’autre, et ce que nous appellerions des travées tout à l’entour. La basilique d’ailleurs, faisant partie du forum, entroit dans un ensemble de bâtimens, qui ne permettoit pas d’en faire toujours un édifice entière-


ment isolé. L’ordonnance extérieure des temples, surtout des temples périptères, ne pouvoit point s’y appliquer, et leur hauteur comparée à leur largeur, n’eût pas permis de donner à leur entrée ces portiques, ou péristyles en colonnes, qui portoient le fronton à la hauteur du comble de l’édifice.

Telles se montrent à nous ces premières basiliques chrétiennes, formées à l’instar des basiliques profanes, d une nef très-élevée, et de bas côtés, ce qui au dehors repoussa le système d’unité d’ordonnance des temples antiques.

Aussi voyons-nous que l’architecture ne pouvant appliquer à de telles élévations une ordonnance simple et régulière, laissa subsister en dehors les masses de la construction sans les orner. On se contenta de placer en avant de l’entrée, un petit portique qui ne tient en rien à la masse générale. Cette disposition se trouve être assez uniformément la même à toutes les anciennes basiliques chrétiennes de Rome. Quelquefois la peinture ou la mosaïque furent employées à orner la façade antérieure du corps de bâtiment, lequel, formant la nef, s’élève au-dessus de la masse subordonnée des bas côtés.

En un mot, nous ne voyans point que l’architecture ait alors tenté d’appliquer à l’incohérence des masses d’un tel ensemble, aucune composition, soit en se raccordant à chacune des parties, soit en les masquant par ces devantures qu’on appelle aujourd’hui portails.

Ce qu’il importe de faire remarquer dans l’historique de cette partie de l’architecture moderne, c’est que les premiers monumens religieux du christianisme à Rome, se composent tous d’une nef extrêmement élevée, et des bas côtés qui furent ainsi appelés, comme étant toujours de moitié moins hauts que la nef.

Ce fut donc là le modèle des temples chrétiens ; et nous ne saurions douter qu’on l’ait imité, dans toutes les églises, auxquelles succédèrent, vers le douzième siècle, eu Europe, ces grands monumens de l’architecture qu’on nomma gothique. (Voyez ce mot. ) A cela près du goût de construction et de décoration, qui donne à ces édifices, au dehors surtout, un caractère si différent de celui des premières basiliques, et en général de celui qui s’étoit perpétué en Italie dans les ouvrage contemporains, l’aspect, l’ensemble et l’ordonnance des intérieurs de presque toutes les grandes églises gothiques, ne nous présentent autre chose, que l’imitation des plans et des élévations des primitives églises ; c’est-à-dire une très-grande et très-haute nef, accompagnée d’un ou deux rangs de bas côtés, de beaucoup inférieurs. Ce sont les plans et les élévations des basiliques de l’ancien Saint-Pierre et de Saint-Paul à Rome, ainsi que de Sainte-Marie-Majeure. La seule différence est dans l’emploi des piliers au lieu de colonnes.