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fois ils partagent la chose par la moitié, en faisant saillir et porter à faux l’architrave par-delà le nu de la colonne, d’une moitié, et de le retirer de l’autre moitié sur le nu du pilastre, ainsi que cela se voit au Marché de Nerva. »

Le pilastre, lorsqu’il entre dans les ordonnances des colonnes, est, comme on le voit, soumis, pour sa forme et sa proportion, aux mêmes conditions que la colonne. Quant aux cannelures, il règne plus de liberté dans l’application qu’on peut en faire aux pilastres. Plus d’une diversité chez Les Anciens a lieu à cet égard. Quelquefois des pilastres cannelés se trouvent associés à des colonnes sans cannelures. Cela se voit au portique du Panthéon, et cela s’y explique, sans doute, par la différence des matières. Les pilastres y sont de marbre blanc, lorsque les colonnes y sont de granit, matière qui ne comporte point le travail de la cannelure, et dont le principal mérite tient au lisse comme au poli, qui en fait ressortir le prix. Il y a quelquefois aussi des colonnes cannelées qu’accompagnent des pilastres non cannelés. L’exemple s’en trouve au temple de Mars Vengeur et au portique de Septimius. Disons encore que, lorsque les pilastres ont en saillie moins de la moitié de leur diamètre, on ne pratique point de cannelures à cette partie qu’on appelle en retour.

Le nombre des cannelures n’a rien de fixe dans les pilastres, si l’on consulte l’autorité de l’antique. Par exemple, il n’y en a que sept aux pilastres du portique du Panthéon, à l’Arc de Septime Sévère et à celui de Constantin. Les pilastres de l’intérieur du Panthéon ont neuf cannelures, bien que, selon l’usage ordinaire, les colonnes n’en aient que vingt-quatre. Les cannelures, dans le pilastre, se pratiquent toujours en nombre impair, si ce n’est qu’aux demi-pilastres, qui font un angle rentrant, on met quatre cannelures au lieu de trois et demie, et cinq au lieu de quatre et de mie, lorsque, dans la même ordonnance, les pilastres entiers en ont sept ou neuf. Cela se fait ainsi pour éviter le mauvais effet du chapiteau, qui, étant replié dans l’angle, seroit trop rétréci par eu haut, et particulièrement eu égard au chapiteau orné de feuilles, qui, sans cet élargissement, n’y seroient pas suffisamment développées.

Les proportions des chapiteaux sont les mêmes aux pilastres qu’aux colonnes pour ce qui est des hauteurs ; mais les largeurs sont différence. Le développement de la forme da pilastre donnant un plus grand espace à chacune de ses faces, si on le suppose quadrangulaire ; un observe toutefois de ne lui donner que le même nombre de feuilles, qui doit être huit pour la circonférence. Il y a cependant aux thermes de Dioclétien et au frontispice de Néron, des exemples de douze feuilles au lieu de huit. La disposition ordinaire des feuilles an chapiteau ; du pilastre corinthien est telle, qu’au rang d’en bas ou en place deux, au rang d’en haut une au milieu, et deux et demie aux côtés, qui sont la moitié des grandes feuilles, placées sur l’angle. Ce qu’il faut encore remarquer, c’est que le haut du tambour n’a point sa superficie plane comme le bas, mais qu’il est relevé dans son milieu, c’est-à-dire, bombé. Il l’est ainsi de la huitième partie du diamètre inférieur de la colonne à la basilique d’Antonin ; mais il ne l’est que de la dixième au portique de Septimius, et de la douzième au portique du Panthéon. (La plus grande partie de ces observations sont tirées du Traité de l’ordonnance des colonnes, par Perrault.)

De l’emploi et de l’abus du pilastre.

Ce qu’on vient de dire sur l’origine du pilastre a dû prouver que, selon la manière la plus ordinaire de l’employer aujourd’hui, il n’est autre chose qu’une colonne carrée, qu’on suppose engagée dans un mur, et qui par conséquent peut être, dans cet état, appliquée à l’ordonnauce des édifices, avec autant de raison et de vraisemblance que la colonne circulaire, lorsqu’on l’adosse à un massif ou qu’on l’y engage.

Voilà pour celui qui veut n’admettre dans l’architecture, que ce dont on peut rendre raison en en constatant l’origine.

Maintenant nous dirons que le pilastre peut être aussi considéré comme une représentation fictive de la colonne, et la remplacer avec convenance dans beaucoup de cas. Quelques-uns, je le sais, voudroient exclure l’emploi du pilastre des pratiques usuelles de l’architecture, fondés sur ce que les monuments qui nous restent de l’art des Grecs, ne nous montrent point cette sorte d’ordonnance, comme ayant eu cours généralement dans leurs édifices. Mais nous ferons, à ce sujet, une observation que nous avons déjà répétée plus d’une fois ; c’est que, d’une part, il ne nous est guère parvenu de l’architecture originale des Grecs, qu’un fort petit nombre d’ouvrages, et qu’il n’y a rien à en conclure de général ni d’absolu. D’autre part, nous dirons que les ouvrages d’où l’on voudrait tirer des conséquences péremptoires contre l’emploi des pilastres, étant presque tous des temples assez uniformes dans leurs plans et leurs élévations, il n’y a rien à en conclure, sinon que l’usage général de leurs ordonnances n’admettoit le plus souvent que des colonnades isolées, et toutefois l’on a vu que le grand temple de Jupiter à Agrigente avoit, dans son intérieur, des pilastres engagés dans le mur et despilastres isolés ou des colonnes carrées.

Cela Suffit pour rendre vraisemblable que dans beaucoup d’autres genres d’édifices et de constructions, que nous ne pouvons plus, connoître, les Grecs, aux meilleurs temps de l’art, ont pu ap-

Diction. d’Archit. Tome III
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