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qu’une influence déplorable sur l’intelligence et sur les mœurs. Il condamne la pensée, il anéantit la raison, il a combattu perpétuellement toutes les vérités successivement acquises par la science. Il est inintelligible dans ses dogmes, arbitraire, variable, indifférent en morale. » Voilà la thèse, et on ne peut nier en effet qu’elle ne soit démontrée point par point, et très exactement : il suffit pour cela de prendre dans l’histoire, en les triant soigneusement, les faits qui peuvent paraître les plus choquants et de les faire défiler les uns derrière les autres, en ayant bien soin d’en retrancher tout ce qui les explique, d’enlever à ces manifestations extérieures tout support de vie ; naturellement, les faits contraires sont passés sous silence, et par exemple dans les persécutions qu’eut à subir l’Église primitive, l’auteur ne voit que les apostasies. De sens historique il n’est plus question ; c’est l’histoire religieuse mise en scène pour Guignol. Par cette direction de son antichristianisme, l’esprit de Leconte de Lisle

    fait dédaigneuse. C’est dans l’étude sur l’Inde française (citée par M.-A. Leblond sans indication de provenance ; c’étaient des articles d’une revue). Parlant des atrocités commises par les Anglais, p. 320:« L’Espagne catholique, elle aussi, a sans doute laissé dans les deux Amériques de sanglants souvenirs ; mais l’héroïsme et la foi les ennoblissent, s’ils ne les excusent. » Mais l’Angleterre, elle, est (p. 327) « une nation protestante et marchande, c’est-à-dire radicalement antipathique à tout acte chevaleresque et désintéressé ».