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la tête, et fit un signe de la main pour refuser obstinément l’offre du squire, « oui, nous autres vieux, nous pouvons bien désirer être jeunes ce soir, lorsque nous voyons le rameau de gui suspendu dans le salon blanc[1]. Il est vrai que la plupart des choses ont rétrogradé pendant ces trente dernières années. Le pays périclite depuis que le vieux roi est tombé malade[2]. Mais quand je regarde Mlle Nancy que voilà, je commence à croire que les jeunes filles conservent leurs avantages. Qu’on me pende si je me rappelle avoir vu une beauté qui lui soit comparable, même au temps où j’étais un beau jeune homme, et où je faisais grand cas de ma cadenette. Soit dit sans vous offenser, madame, » ajouta-t-il, en se penchant vers Mme Crackenthorp, assise près de lui ; « vous, je ne vous connaissais pas lorsque vous étiez jeune comme Mlle Nancy que voilà. »

Mme Crackenthorp, — petite femme qui clignotait de l’œil et agitait continuellement ses dentelles, ses rubans et sa chaîne d’or, et tournait la tête à droite et à gauche, en faisant entendre des bruits réprimés,

  1. Pendant les fêtes de Noël, et celles du jour de l’an quelques fois, c’est la coutume, en Angleterre, de suspendre une touffe de gui dans les maisons, et toute jeune fille qui s’arrête au-dessous peut, sans infraction aux règles de l’étiquette, être embrassée par un jeune homme. Il y a des jeunes filles qui évitent le perfide rameau, mais il y en a d’autres qui le recherchent plus souvent qu’il ne faudrait. (N. du Tr.)
  2. George III, qui fut frappé d’insanité, en 1788. Il se guérit bientôt, mais il eut encore des attaques momentanées. Enfin, en 1811, il perdit complètement la raison. (N. du Tr.)