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merais autant vous voir épouser la fille de Lammeter que toute autre. Je suppose que, si je vous avais dit non, vous auriez persisté dans votre intention ; à défaut de contradiction, vous avez changé d’avis. Vous êtes comme une girouette ; vous tenez de votre pauvre mère. Elle n’a jamais eu de force de caractère. Il est vrai que c’est inutile à une femme si son mari est un homme comme il faut, mais cette qualité serait bien nécessaire à la vôtre, car vous avez à peine assez de volonté pour faire marcher vos deux jambes dans la même direction. La jeune fille n’a pas dit pour tout de bon qu’elle ne voulait pas de vous, n’est-ce pas ?

— Non, dit Godfrey, sentant une vive chaleur lui monter au visage, et se trouvant mal à son aise ; mais je ne crois pas qu’elle veuille de moi.

— Vous ne croyez pas ! Pourquoi n’avez-vous pas le courage de le lui demander ? Avez-vous toujours le désir de l’épouser, elle ? Voilà la question.

— Je n’en désire pas d’autre, répondit Godfrey d’une manière évasive.

— Eh bien, alors, laissez-moi faire la demande à votre place, voilà tout, si vous n’avez pas le cœur de la faire vous-même. Il n’est pas probable que Lammeter voie d’un mauvais œil sa fille se marier dans ma famille, à moi, il me semble. Quant à la jolie jeune fille, elle n’a pas voulu de son cousin, et je ne vois pas d’autre soupirant qui aurait pu vous couper l’herbe sons le pied.