Page:Elder - Le Peuple de la mer.djvu/177

Cette page a été validée par deux contributeurs.

au ventre et de la foi au cœur. D’un instant à l’autre, le grain va tomber ainsi qu’un coup de faux.

Le phare brille avec cette acuité que prennent les feux dans les soirs d’orage, car les colères du temps les troublent et ils font signe de toute la force de leur lumière. La gerbe de l’Ile d’Yeu rase au sud la nuit sourde ; le Four, la Banche, le Charpentier, éclatent dans l’estuaire. Il y a donc encore de la terre et des hommes dans ces ténèbres : cela donne du cœur.

Descendu de la tour où il veillait sous la lanterne, Sémelin cherchait son matelot dans les chambres basses et l’appelait :

— Jean-Baptiste ! Jean-Baptiste !

Mais le gars n’étant nulle part, il ouvrit la porte, fit trois pas sur l’ilot et répéta :

— Jean-Baptiste ! Jean-Baptiste !

Son cri porta loin dans le silence. Il écouta. Un pas sembla sonner là-bas, du côté du sémaphore. Puis plus rien que le tonnerre d’une vague dans les roches.

Le vieux rentra en grognant :

— Toujours la femelle !

Mais Gaud, qui se rendait au phare pour chercher sa femme, connut, à l’appel de Sémelin, qu’elle avait rejoint Piron, par là, dans les ténèbres. Il ôta ses galoches et vint à la sourdine.