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… Pour elle, cette médecine que nous étudions ensemble n’est ni un métier, ni un art : c’est un sacerdoce. Par elle, Chouchina servira l’humanité. Parfois, elle s’étonne de me voir sourire de ses théories, quand elle sait que toute souffrance m’affecte profondément, quand elle voit que je souffre plus intensément qu’elle-même, peut-être, de voir souffrir.

… Elle est très frêle. Il semblerait que le moindre souffle devrait faire vaciller la petite flamme vive de son existence… Et cependant, elle est d’une activité menue et silencieuse de fourmi, d’un dévouement perpétuel et patient. Elle sembla aussi inaccessible au découragement qu’à l’enthousiasme.

    
Juillet.

Chouchina m’inquiète. Sa santé est bien plus chancelante que je ne le croyais. Elle a depuis quelques jours des faiblesses. Son sommeil est troublé et elle se réveille baignée de sueur froide. Elle tousse…

Et, parfois, depuis que, plus attentivement, je l’observe, je surprends dans le regard jadis si calme de ses grands yeux gris lilas, une expression de crainte, presque d’angoisse. Mais elle ne se plaint pas, elle se soigne consciencieusement, et continue son travail obstiné : en octobre, elle doit passer son doctorat.