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combien je voudrais pouvoir te garder auprès de moi, toujours.

Il sentait les lèvres chaudes de Yasmina lui caresser doucement les mains, dans le débordement de leurs larmes mêlées… Ce contact réveilla en lui d’autres pensées, que la douleur avait momentanément assoupies, et ils eurent encore un instant de joie si profonde, si absolue qu’ils n’en avaient jamais connue de semblable même aux jours de leur tranquille bonheur.

— Oh ! comment nous quitter ! bégayait Yasmina, dont les larmes continuaient de couler.

Deux fois encore, Jacques revint et ils retrouvèrent cette indicible extase qui semblait devoir les lier l’un à l’autre, indissolublement et à jamais.

Mais enfin, l’heure solennelle des adieux sonna… de ces adieux que l’un savait, et que l’autre pressentait éternels…

Dans leur dernier baiser, ils mirent toute leur âme…

Longtemps, Yasmina écouta retentir au loin le galop cadencé du cheval de Jacques… Quand elle ne l’entendit plus, et que la plaine fut retombée au lourd silence accoutumé, la petite Bédouine se jeta la face contre terre et pleura…

    

Un mois s’était écoulé depuis le départ de Jacques, Yasmina vivait en une sorte de torpeur morne.