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remettre une pétition. Le maréchal prit le pli et, sans rien dire, le passa à l’un de ses aides de camp. Mais sur ses traits s’était dessinée une moue expressive propre à faire comprendre qu’il trouvait la démarche de l’officier contraire à la discipline et qu’il ne tolérerait pas qu’un acte semblable se reproduisît. Il se reproduisit cependant le surlendemain dans une autre ville et dans des conditions analogues. Seulement, cette fois, ce fut un commandant qui sortit des rangs un placet à la main. Le maréchal ne s’arrêta qu’une minute, et, vivement, d’une voix sévère, il dit :

« Avant d’aller prendre les arrêts pour quinze jours, remettez votre pétition au colonel Broye. »

Ce fut net, spontané, et, pour tout résumer, un chef-d’œuvre de présence d’esprit. Dans sa vie militaire, les traits pareils se comptent par centaines, et quelques-uns dans des circonstances autrement dramatiques. Le « j’y suis, j’y reste, » de la tour Malakoff deviendra légendaire. Durant le voyage de Bretagne, le maréchal, par ce merveilleux à-propos, par sa simplicité, conquit les populations. Elles ne saluaient en lui ni la politique, ni l’homme du 24 mai, ni le président de la République, mais