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ficateur d’une société profondément divisée.

« C’est bien là ce que le maréchal voulait être ; mais mille symptômes tendaient à révéler qu’il était obsédé par le souvenir des origines de son pouvoir, sentiment logique et humain, né de la fatalité même d’une situation qu’il n’avait pas créée, et que tout autre, à sa place, eût subie comme il la subissait. L’irresponsabilité du chef de l’État est sans doute une admirable et précieuse fiction dans une constitution monarchique ; elle est presque impraticable dans une organisation républicaine. Il n’était pas plus possible au maréchal que cela ne l’a été ensuite à son successeur de représenter aux yeux de la France et de l’Europe d’autres opinions que celles de la majorité qui l’avait élu. »

Nous pourrions ajouter à ce qui précède que le jour où cette majorité fut vaincue sur le terrain électoral, il se sentit vaincu avec elle, et qu’il ne put se résigner à gouverner avec des hommes considérés jusque-là, par lui, comme des adversaires. C’est pour se débarrasser d’eux qu’il fit le 16 mai, et c’est parce que, après le dénouement de cette entreprise, il ne pouvait continuer à vivre avec eux ni subir leurs exi-