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clergé ne lui savait aucun gré de sa modération, de son éclectisme. Histoire éternelle des partis, toujours jaloux, soupçonneux, exigeants et intolérants.

Ce que nul ne contestait, et ne pouvait contester à M. Jules Simon, c’était son éloquence. Il avait la parole harmonieuse, douce et pénétrante ; son regard voilé, son front penché, encadré de longs cheveux bouclés, aidaient à le rendre sympathique à ses auditeurs, comme, plus tard, la forme exquise de ses livres devait le rendre sympathique à ses lecteurs. Ceux qui l’ont connu vers ce temps en ont conservé un souvenir aimable et profond.

Rien dans cette voix si vite épuisée, dans ces accents si vite émus, dans ces phrases si merveilleusement lancées, et toujours avec un à propos qui est de l’art, rien ne laissait prévoir encore les énergies révélées depuis, énergie de tribune, énergie de conduite, admirées et applaudies par ceux qui furent les témoins des luttes oratoires du Corps législatif ou des incidents de Bordeaux en 1871. Non, ce n’était encore qu’un écho des orateurs de la Grèce. Lorsqu’en 1851 il parlait aux auditeurs de la Sorbonne d’Aristote et de Platon, il eût été mal-