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LES DEUX TESTAMENTS

plutôt affectée que véritable, s’il faut le dire, le veuf commença.

M. Renaud, vous êtes un homme d’honneur et de probité, je le sais.

Très flatté, M. Renaud s’inclina.

— Vous garderez le secret que je vous confie.

J’aime votre fille depuis deux ans.

Du reste, cela ne doit pas vous étonner, car avec votre perspicacité ordinaire, vous avez dû deviner mes sentiments.

— Vous ne vous trompez pas, mon cher ami, il y a longtemps, déjà, que je me suis aperçu de votre amour pour ma fille, et je dois ajouter que cette découverte m’a fait bien plaisir, car vous possédez des qualités qui ne peuvent manquer de rendre une femme heureuse.

Mais une chose s’oppose à la réalisation de vos désirs. C’est l’attachement de Maria pour ce jeune fou de Xavier LeClerc.

— Quant à cela, il ne faut pas désespérer, dit le veuf, Maria finira par changer de sentiments, quand elle s’apercevra que celui qu’elle aime, est indigne d’elle. Patientons un peu. J’aime assez votre fille pour attendre avec patience qu’elle soit mieux disposée à mon égard.

Tout ce que je vous demande pour le présent, c’est la permission de faire mon possible pour me faire aimer d’elle et la promesse que vous me la donnerez en mariage quand elle-même y consentira.

— De grand cœur, Bernier ! oui, de grand cœur ! et j’espère que vous réussirez à lui faire oublier ce misérable LeClerc.

Le veuf avait ses raisons en disant qu’il était tout disposé à attendre le bon plaisir de Maria, car il savait bien qu’il ne pouvait songer sérieusement au mariage avant la mort de sa belle mère, car celle-ci ne lui aurait certes pas pardonné de songer à une nouvelle épouse, alors qu’elle le croyait encore occupé à pleurer sa première femme.

Il était donc important de continuer à lui cacher soigneusement ses relations avec les Renaud, s’il ne voulait pas risquer de perdre l’héritage tant convoité.