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LES DEUX TESTAMENTS

Il faudra que je le fasse venir et que je m’explique avec lui à ce sujet.

— Et il vous dira que j’ai menti, sans doute. Mais faites-le si vous voulez, puisque vous avez plus de confiance en lui qu’en moi. Je croyais pourtant m’être toujours conduit de façon à la mériter, votre confiance, mais je vois que je me faisais illusion à ce sujet.

En disant cela, Bernier avait un air triste qui faisait peine à voir.

Aussi, Mde Champagne fut-elle touchée de componction.

— Je n’ai pas voulu vous froisser, Edmond, dit elle avec douceur, et vous savez bien que j’ai une entière confiance en vous. Pour vous le prouver, je ne ferai pas demander Georges, car je sais bien que vous me dites là vérité.

Puis, l’indignation reprenant le dessus, elle ajouta avec fermeté.

— Dans tous les cas, il n’a pas à compter sur ma mort, car je compte bien ne rien lui laisser. Je n’en ai pas trop pour mon pauvre petit Joseph, à part de ce que je veux vous laisser pour vous récompenser de vos bontés pour moi et du soin que vous avez pris de mes affaires.

Là dessus, elle se retira pour la nuit et Bernier, resté seul, se mit à réfléchir profondément.

Voilà à peu près ce qu’il se disait en lui-même.

— Voilà toujours un pas de fait. Maintenant, si Georges Vernette revient ici malgré les histoires que je lui ai faites, il trouvera la vieille si froide et si réservée qu’il croira que j’ai dit la vérité.

Mais je ne crois pas qu’il revienne. Il a eu l’air trop furieux quand je lui ai dit il y a quelque temps que la vieille le traitait de coureur d’héritage.

À moins que le diable ne s’en mêle, ils courent la chance de rester brouillés jusqu’à la fin des temps. Tant mieux pour moi !

Si elle pouvait seulement se décider à faire son testament à présent et à me laisser une part qui en vaudrait la peine !