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V. — Conclusion.


Une fois les faits établis, la question que nous nous sommes posée est résolue. Il n’y a qu’à les laisser parler : ils disent d’eux-mêmes qui a voulu la guerre.

Ce n’est évidemment pas la France. Même ses pires ennemis n’ont pas porté contre elle cette accusation. En fait, elle a, jusqu’au bout et de toutes ses forces, lutté pour la paix. On a dit[1], il est vrai, qu’elle n’avait jamais oublié l’Alsace-Lorraine. Mais qui oserait lui faire un crime d’être fidèle à la religion du souvenir ? On ne pourrait lui reprocher des sentiments aussi naturels et aussi légitimes que s’ils s’étaient traduits en actes ou agressifs ou imprudents, de nature à troubler la paix de l’Europe. Mais l’attitude extérieure de la France fut toujours d’une irréprochable correction. On l’avait bien vu lors des douloureux incidents de Saverne.

Il est tout aussi impossible de mettre l’Angleterre en cause. C’est elle qui a présidé à toutes les tentatives de conciliation ; c’est même elle qui, le plus souvent, les a suscitées. L’attachement de l’Angleterre à la paix était même tel que Sir Ed. Grey n’aurait pas hésité à se considérer comme délié de toute obligation envers la France et la Russie si la guerre avait éclaté par la faute de ces deux pays. Le 31 juillet, il télégraphiait à Sir E. Goschen : « J’ai dit à l’ambassadeur d’Allemagne ce matin que, si l’Allemagne faisait une proposition raisonnable qui montrerait clairement que l’Allemagne et l’Autriche s’efforçaient de préserver la paix européenne, et si la Russie et la France étaient assez déraisonnables pour la repousser, je la soutiendrai à Saint-Pétersbourg et à Paris,

  1. C’est le langage tenu par le Chancelier allemand à la tribune du Reichstag, le 2 décembre 1914.