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cette dernière. Un grave déni de justice, un acte d’agression sans raison apparente pouvait l’émouvoir. Or, la déclaration de guerre que l’on méditait le 29 juillet avait évidemment ce caractère. Déclarer la guerre à la Russie parce qu’elle avait mobilisé contre l’Autriche, et cela alors que l’Autriche n’y trouvait rien à redire, c’était avouer qu’on voulait la guerre pour la guerre. On jouait donc un jeu dangereux en rompant dans ces conditions. Au contraire, une mobilisation générale de la Russie que l’on pouvait, avec un peu d’habileté, présenter comme dirigée explicitement contre l’Allemagne, était un motif plus spécieux et qui risquait moins de révolter les sentiments pacifistes de l’Angleterre. C’est pourquoi on préféra patienter. La patience était d’autant plus facile qu’il était aisé de prévoir, dès le 30[1], le cours qu’allaient prendre les événements, pour peu surtout qu’on les y aidât. La mobilisation générale de l’Autriche qui était imminente et que, très vraisemblablement, M. de Tschirsky connut et ne déconseilla pas au Gouvernement de Vienne, devait nécessairement obliger la Russie à une mesure correspondante. Une meilleure occasion était donc toute prochaine.


Déclaration de guerre à la France. — Qu’allait faire la France ?

Nul ne mettait en doute qu’elle remplirait ses devoirs envers son alliée. Mais, afin de bien faire éclater devant le monde la volonté arrêtée qu’avait l’Allemagne de faire la guerre à la France, le Gouvernement français s’interdit tout ce qui pourrait ressembler à un acte d’hostilité. En annonçant à nos ambassadeurs que la mobilisation française était décrétée, M. Viviani eut soin de les prévenir qu’elle constituait une simple mesure de préservation qui n’empêcherait pas le Gouvernement de poursuivre les négociations commencées[2]. De plus, pour éviter tout incident que l’Alle-

  1. Dès le 30, M. de Jagow annonçait que l’Autriche allait décider la mobilisation générale (L. J., no 109).
  2. L. J., no 127.