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nullement conçu comme associé à un esprit[1]. Sa nature religieuse lui vient donc d’une autre source, et d’où lui pourrait-elle venir sinon de l’empreinte totémique qu’il porte ? Ainsi, c’est à cette image que s’adressent, en réalité, les démonstrations du rite ; c’est elle qui sanctifie l’objet sur lequel elle est gravée.

Mais il existe, chez les Arunta et dans les tribus voisines, deux autres instruments liturgiques nettement rattachés au totem et au churinga lui-même qui entre ordinairement dans leur composition : c’est le nurtunja et le waninga.

Le nurtunja[2], qui se rencontre chez les Arunta du nord et chez leurs voisins immédiats[3], est fait essentiellement d’un support vertical qui consiste soit en une lance, soit en plusieurs lances réunies en faisceau, soit en une simple perche[4]. Des touffes d’herbes sont maintenues tout autour au moyen de ceintures ou de bandelettes, faites de cheveux. On ajoute par là-dessus du duvet disposé soit en cercles, soit en lignes parallèles qui courent du haut en bas du support. Le sommet est décoré au moyen de plumes d’aigle-faucon. Ce n’est là, d’ailleurs, que la forme la plus générale et la plus typique ; elle comporte toutes sortes de variantes suivant les cas particuliers[5].

Le waninga, qui se trouve uniquement chez les Arunta du sud, chez les Urabunna, le Loritja, n’est pas davan-

  1. C’est le cas des Warramunga, des Urabunna, des Worgaia, des Umbaia, des Tjingilli, des Gnanji (North. Tr., p. 258, 275-276). Alors, disent Spencer et Gillen, they were regarded as of especial value because of their association with a totem (ibid., p. 276). Il y a des exemples du même fait chez les Arunta (Nat. Tr., p. 156).
  2. Strehlow écrit Inatanja (op. cit., I, p. 4-5).
  3. Les Kaitish, les Ilpirra, les Unmatjera ; mais il est rare chez ces derniers.
  4. La perche est quelquefois remplacée par des churinga très longs, mis bout à bout.
  5. Parfois, au sommet du nurtunja, un autre plus petit est suspendu. Dans d’autres cas, le nurtunja a la forme d’une croix ou d’un T. Plus rarement, le support central fait défaut (Nat. Tr., p. 298-300, 360-364, 627).