Page:Durkheim - Les Formes élémentaires de la vie religieuse.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il en est le couronnement et la consécration, quand le néophyte est admis à pénétrer dans le sanctuaire où sont conservés tous les objets sacrés qui appartiennent au clan, on exécute sur lui une peinture emblématique : or cette fois c’est le totem du jeune homme qui est ainsi représenté[1]. Les liens qui unissent l’individu à son totem sont même tellement étroits que, dans les tribus de la côte Nord-Ouest de l’Amérique du Nord, l’emblème du clan est peint non seulement sur les vivants, mais même sur les morts : avant d’ensevelir le cadavre, on met sur lui la marque totémique[2].

III

Déjà ces décorations totémiques permettent de pressentir que le totem n’est pas seulement un nom et un emblème. C’est au cours de cérémonies religieuses qu’elles sont le totem, en même temps qu’il est une étiquette collective, a un caractère religieux. Et, en effet, c’est par rapport à lui que les choses sont classées en sacrées et en profanes. Il est le type même des choses sacrées.

Les tribus de l’Australie centrale, principalement les Arunta, les Loritja, les Kaitish, les Unmatjera, les Ilpirra[3], se servent constamment dans leurs rites de certains instruments qui, chez les Arunta, sont appelés suivant

  1. Nat. Tr., p. 140. Dans ce cas, le novice conserve la décoration dont il a été ainsi paré jusqu’à ce que, par l’effet du temps, elle s’efface d’elle-même.
  2. Boas, General Report on the Indians of British Columbia, in British Association for the Advancement of Science, Firth Rep. of the Committee on the N. W. Tribes of the Dominion of Canada, p, 41.
  3. Il y en a aussi chez les Warramunga, mais en plus petit nombre que chez les Arunta, et ils ne figurent pas dans les cérémonies totémiques bien qu’ils tiennent une certaine place dans les mythes (North. Tr., p. 163).