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conditions principales. Il faut d’abord qu’il ait de la volonté. Car l’autorité implique la confiance, et l’enfant ne peut donner sa confiance à quelqu’un qu’il voit hésiter, tergiverser, revenir sur ses décisions. Mais cette première condition n’est pas la plus essentielle. Ce qui importe avant tout, c’est que l’autorité dont il doit donner le sentiment, le maître la sente réellement en lui. Elle constitue une force qu’il ne peut manifester que s’il la possède effectivement. Or d’où peut-elle lui venir ? Serait-ce du pouvoir matériel dont il est armé, du droit qu’il a de punir et de récompenser ? Mais la crainte du châtiment est tout autre chose que le respect de l’autorité. Elle n’a de valeur morale que si le châtiment est reconnu comme juste par celui-là même qui le subit : ce qui implique que l’autorité qui punit est déjà reconnue comme légitime. Ce qui est en question. Ce n’est pas du dehors que le maître peut tenir son autorité, c’est de lui-même ; elle ne peut lui venir que d’une foi intérieure. Il faut qu’il croie, non en lui, sans doute, non aux qualités supérieures de son intelligence ou de son cœur, mais à sa tâche et à la grandeur de sa tâche. Ce qui fait l’autorité dont se colore si aisément la parole du prêtre, c’est la haute idée qu’il a de sa mission ; car il parle au nom d’un dieu dont il se croit, dont il se sent plus proche que la foule des profanes. Le maître laïc peut et doit avoir quelque chose de ce sentiment. Lui aussi, il est l’organe d’une grande personne morale qui le dépasse : c’est