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suite des changements survenus dans la structure des sociétés européennes, une nouvelle conception de l’homme et de sa place dans le monde avait fini par se faire jour. De même, les pédagogues qui, à la fin du XVIIIe siècle ou au commencement du XIXe, entreprirent de substituer la méthode intuitive à la méthode abstraite, étaient avant tout l’écho des aspirations de leur temps. Ni Basedow, ni Pestalozzi, ni Frœbel n’étaient de bien grands psychologues. Ce qu’exprime surtout leur doctrine, c’est ce respect pour la liberté intérieure, cette horreur pour toute compression, cet amour de l’homme et, par suite, de l’enfant qui sont à la base de notre individualisme moderne.

Ainsi, sous quelque aspect que l’on considère l’éducation, elle se présente partout à nous avec le même caractère. Qu’il s’agisse des fins qu’elle poursuit ou des moyens qu’elle emploie, c’est à des nécessités sociales qu’elle répond ; ce sont des idées et des sentiments collectifs qu’elle exprime. Sans doute, l’individu lui-même y trouve son profit. N’avons-nous pas expressément reconnu que nous devons à l’éducation le meilleur de nous-même ? Mais c’est que ce meilleur de nous-même est d’origine sociale. C’est donc toujours à l’étude de la société qu’il en faut revenir ; c’est là seulement que le pédagogue peut trouver les principes de sa spéculation. La psychologie pourra bien lui indiquer quelle est la meilleure manière de s’y prendre pour