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ailleurs l’éducation répond avant tout à des nécessités externes, c’est-à-dire sociales, c’est qu’il est des sociétés où ces qualités n’ont pas été cultivées du tout et qu’en tout cas elles ont été entendues très différemment selon les sociétés. Il s’en faut que les avantages d’une solide culture intellectuelle aient été reconnus par tous les peuples. La science, l’esprit critique, que nous mettons aujourd’hui si haut, ont été pendant longtemps tenus en suspicion. Ne connaissons-nous pas une grande doctrine qui proclame heureux les pauvres d’esprit ? Et il faut se garder de croire que cette indifférence pour le savoir ait été artificiellement imposée aux hommes en violation de leur nature. D’eux-mêmes, ils n’avaient alors aucun désir de la science, tout simplement parce que les sociétés dont ils faisaient partie n’en sentaient aucunement la nécessité. Pour pouvoir vivre, elles avaient avant tout besoin de traditions fortes et respectées. Or la tradition n’éveille pas, mais tend plutôt à exclure, la pensée et la réflexion. Il n’en est pas autrement des qualités physiques. Que l’état du milieu social incline la conscience publique vers l’ascétisme, et l’éducation physique sera spontanément rejetée au dernier plan. C’est un peu ce qui s’est produit dans les écoles du moyen âge. De même, suivant les courants de l’opinion, cette même éducation sera entendue dans les sens les plus différents. À Sparte, elle avait surtout pour objet d’endurcir les membres à la fatigue ; à Athènes, elle était un moyen de faire des corps