Page:Durkheim - Éducation et sociologie.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

science morale de notre temps aurait reçu sur ce point la satisfaction qu’elle attend, l’éducation ne deviendrait pas pour cela plus uniforme. Alors même que la carrière de chaque enfant ne serait plus prédéterminée, au moins en grande partie, par une aveugle hérédité, la diversité morale des professions ne laisserait pas d’entraîner à sa suite une grande diversité pédagogique. Chaque profession, en effet, constitue un milieu sui generis qui réclame des aptitudes particulières et des connaissances spéciales, où règnent certaines idées, certains usages, certaines manières de voir les choses ; et comme l’enfant doit être préparé en vue de la fonction qu’il sera appelé à remplir, l’éducation, à partir d’un certain âge, ne peut plus rester la même pour tous les sujets auxquels elle s’applique. C’est pourquoi nous la voyons, dans tous les pays civilisés, qui tend de plus en plus à se diversifier et à se spécialiser : et cette spécialisation devient tous les jours plus précoce. L’hétérogénéité qui se produit ainsi ne repose pas, comme celle dont nous constations tout à l’heure l’existence, sur d’injustes inégalités ; mais elle n’est pas moindre. Pour trouver une éducation absolument homogène et égalitaire, il faudrait remonter jusqu’aux sociétés préhistoriques au sein desquelles il n’existe aucune différenciation, et encore ces sortes de sociétés ne représentent-elles guère qu’un moment logique dans l’histoire de l’humanité.

Or il est évident que ces éducations spéciales ne