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la prépondérance politique, il voyait sa civilisation perdre aussi sa suprématie. Comme lui, en effet, l’Anglais avait une langue, un culte, des arts, toute une civilisation qu’à son tour il établissait en maître sur le sol de l’Inde. Or, si l’Hindou avait trouvé à emprunter aux mahométans, à bien plus forte raison trouve-t-il aujourd’hui à emprunter aux Anglais. L’Hindou apprend la langue anglaise, modifie ses idées au souffle venu d’Europe, et se faisant aussi semblable qu’il peut à ses nouveaux maîtres, commence à être en état de leur disputer les carrières administratives et les professions libérales.

Toutes ces transformations au-devant desquelles court l’Hindou, le mahométan, lui, ne les subit que forcé, contraint, ou il y résiste absolument. Il hait non-seulement dans l’Anglais un conquérant qui a pris sa place, il a encore pour lui la haine qu’il a partout pour le chrétien ; il tient avec ténacité à sa religion et aux langues qui s’y rattachent, l’arabe et le persan ; dans ces circonstances, s’il se laisse aller à cultiver les connaissances européennes, il le fait sans entrain et d’une manière incomplète. Dans le milieu nouveau façonné par la conquête anglaise, le mahométan est donc comme un homme hors de ses