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milieu de la chambre, expédié d’une main preste par Margot. C’est qu’elle avait cru, un moment, que ce fût un amoureux venu lui rendre visite ; or, dans la fureur de sa déception elle se vengea donc sur cet appareil sans gloire.

Le traversin était moitié au milieu du lit, moitié à terre, où il paraissait une sorte de prodigieux serpent-boa, un peu court, mais rattrapant cela par la puissance de son diamètre…

Les draps avaient subi un gaufrage soigneux dans tous les sens et sur tous les angles, de telle sorte qu’ils manquaient absolument de dignité. L’un d’eux, celui qui était naguère en dessus était en dessous, mais en dessous du lit, du moins pour partie, et l’autre, entortillé comme une lamproie, faisait la corde traditionnelle avec laquelle les détenus s’évadent des bastilles, après avoir scié les barreaux de leur geôle…

Mais que dire de la couverture ?

Margot s’était d’abord entortillée dedans, puis détortillée, elle la répandait dans sa chambre et à cette heure ce n’était guère qu’un infâme chiffon, moitié sous les formes importantes de la chère enfant, moitié ailleurs. Un bout en traînait dans la cuvette, où Margot, espérant inutilement trouver le calme, grâce à l’usage de l’eau froide, avait, par trois fois, tenté de se plonger fragmentairement…

Là-dessus, la jeune fille était étendue.

Vous ne vous attendez pas que seule chez elle — et même en compagnie — Margot eut conservé les pudeurs puériles qui sont la spécialité des livres de certains romanciers édifiants, qui se rattrapent dans la vie.