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VIII

Surprise

Le secrétaire du marchand d’oranges en faïence était un homme de bureau absolument remarquable. Il tenait les comptabilités en partie double, quadruple et octuple comme un maître de la profession. Il avait une magnifique écriture, disons une calligraphie sans égale dans la rue du Sentier, rue d’Hauteville et même avenue d’Antin. Il additionnait comme une machine, avec une exactitude mathématique, et vous retrouvait, le temps de dire ouf, une erreur de trois millimes dans quinze cents bordereaux.

Bref, c’était le modèle des secrétaires en premier.

Mais, comme amoureux, il était beaucoup moins costaud.

Cela venait de son éducation.

Comme beaucoup de gens élevés dans l’amour, il n’y connaissait absolument rien…

Car la malchance avait voulu que sa mère, veuve, jeune et pleine d’ardeurs insatisfaites, eût des amants à la grosse et ne se gênât jamais avec son fils.

Au demeurant elle y avait gagné quelque fortune, ce qui est excellent, car, quoiqu’en dise le proverbe, la ceinture dorée a depuis longtemps le pas sur la bonne renommée…

Elle ne s’était pas qu’enrichie à ce jeu, elle y conservait sa fraîcheur, et c’est encore un imbécile préjugé de dire que l’amour fane et détériore le corps…