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ses charmes, la posséder nerveusement. Elle dévora le fond d’une boîte de gâteaux, en guise de petit déjeuner. Elle chantait aussi sur un air nouveau : Je suis à toi… qui, pour l’heure, lui semblait le chef-d’œuvre de toutes les littératures, puis elle s’examina encore d’un regard et descendit.

Comme elle passait devant la loge de sa concierge, elle vit en sortir le fils de cette estimable surveillante de l’immeuble, qui lui dit :

— Mademoiselle Margot, il y a quelque chose pour vous.

C’était un jeune homme assez gracieux, d’une couleur de cheveux un peu incertaine, mais en somme qu’on pouvait dire blonde en clignant des yeux…

Margot le suivit dans la loge, où il fit semblant de fourgonner dans les lettres arrivées un moment plus tôt, et non triées. Puis il se tourna vers la belle secrétaire du marchand d’oranges en faïence, pour dire :

— Comme vous êtes jolie, mademoiselle, ce matin.

— Vous trouvez ?

— Et comment. Tenez, vous me faites un effet.

Elle dit, en riant joyeusement :

— Il faut laisser l’effet se faire.

— Je ne demande que ça, fit l’autre, qui s’élança sur Margot et la saisit par ses appas les plus provocants…

— Hé là ! fit-elle en se défendant assez mal, mais juste assez pour sembler victime, chose à laquelle les femmes tiennent toujours, on se demande pourquoi.

Et elle se laissa pousser sur un canapé boiteux, d’un rouge blanchi sous le harnois, qui se trouvait là juste à point. Puis elle répéta sans y croire :