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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

drapeau tricolore au-dessus de sa tête, et où le peuple fait pleuvoir par les fenêtres les papiers du cabinet du roi.

À la hauteur du jardin d’Hippomène et d’Atalante, le maréchal trouve une pièce de canon qui se retire ; sur son ordre, la pièce de canon est remise en batterie, et une dernière volée tirée par elle sur les Tuileries, qui ont cessé d’être la demeure des rois pour devenir la conquête du peuple, va, de son boulet, présent posthume de la monarchie, couper en deux une des charmantes petites colonnes cannelées du premier étage.

Ce dernier coup de canon, qui ne fit de mal à personne qu’au chef-d’œuvre de Philibert Delorme, sembla tiré pour saluer le drapeau tricolore qui se déployait sur le pavillon de l’Horloge.

La révolution de 1830 était faite.

Faite, — nous le disons, nous le répétons, nous l’imprimons, nous le graverons, s’il le faut, sur le fer et sur l’airain, sur le bronze et sur l’acier, — faite, non point par les prudents acteurs de la comédie de quinze ans, cachés dans les coulisses, pendant que le peuple jouait le drame sanglant des trois jours ; non point par les Casimir Périer, les Laffitte, les Benjamin Constant, les Sébastiani, les Guizot, les Mauguin, les Choiseul, les Odilon Barrot et les trois Dupin. Non ! ceux-là, nous l’avons dit, ceux-là se tenaient — pas même dans les coulisses, ils eussent été trop près du spectacle ! — ceux-là se tenaient chez eux, soigneusement gardés, hermétiquement enfermés. Non, chez ceux-là, il ne fut jamais question que de résistance légale, et, le Louvre et les Tuileries pris, on discutait encore, dans leurs salons, les termes d’une protestation que quelques-uns trouvaient bien hasardée.

Ceux qui ont fait la révolution de 1830, ce sont ceux que j’ai vus à l’œuvre, et qui m’y ont vu ; ceux qui entraient au Louvre et aux Tuileries par les grilles rompues et les fenêtres brisées ; c’est, hélas ! — qu’on nous pardonne cette funèbre exclamation, la plupart d’entre eux sont morts, prisonniers, exilés aujourd’hui ! — c’est Godefroy Cavaignac, c’est Baude,