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— Loignac ? voilà-t-il pas une belle perte !

— C’est un brave soldat.

— Un méchant garçon de fortune ; c’est comme cet autre escogriffe qui chevauchait à gauche de la voiture avec ses yeux de braise et sa peau noire.

— Ah ! celui-là, j’y répugnerai moins, je ne le connais pas ; d’ailleurs je suis de votre avis, Madame, et il possède une assez méchante mine.

— Vous me l’abandonnez alors ? dit la duchesse en riant.

— Oh ! de bon cœur, Madame.

— Grand merci, en vérité.

— Mon Dieu ! Madame, je ne discute pas ; ce que j’en dis, c’est toujours pour votre renommée à vous et pour la moralité du parti que nous représentons.

— C’est bien, c’est bien, Mayneville, on sait que vous êtes un homme vertueux, et l’on vous en signera le certificat, si la chose est nécessaire. Vous ne serez pour rien dans toute cette affaire, ils auront défendu le Valois et auront été tués en le défendant. Vous, ce que je vous recommande, c’est ce jeune homme.

— Quel jeune homme ?

— Celui qui sort d’ici ; voyez s’il est bien parti, et si ce n’est pas quelque espion qui nous est dépêché par nos ennemis.

— Madame, dit Mayneville, je suis à vos ordres.

Il alla au balcon, entr’ouvrit les volets, passa sa tête et essaya de voir au dehors.

— Oh ! la sombre nuit ! dit-il.

— Bonne, excellente nuit, reprit la duchesse ; d’autant meilleure qu’elle est plus sombre : aussi, bon courage, mon capitaine.

— Oui ; mais nous ne verrons rien, Madame, et pour vous cependant il est important de voir.

— Dieu, dont nous défendons les intérêts, voit pour nous, Mayneville.