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— Ainsi, Monsieur, voilà tout ce que vous avez à me dire ? demanda la duchesse.

— J’ai fait ma commission, répliqua le jeune homme ; il ne me reste donc plus qu’à présenter mes très-humbles hommages à Votre Altesse.

La duchesse le suivit des yeux sans lui rendre son salut ; puis, lorsque la porte se fut refermée derrière lui :

— Mayneville, dit-elle en frappant du pied, faites suivre ce garçon.

— Impossible, Madame, répondit celui-ci, tout notre monde est sur pied ; moi-même j’attends l’événement ; c’est un mauvais jour pour faire autre chose que ce que nous avons décidé de faire.

— Vous avez raison, Mayneville ; en vérité, je suis folle ; mais plus tard…

— Oh ! plus tard, c’est autre chose ; à votre aise, Madame.

— Oui, car il m’est suspect comme à mon frère.

— Suspect ou non, reprit Mayneville, c’est un brave garçon, et les braves gens sont rares. Il faut avouer que nous avons du bonheur ; un étranger, un inconnu qui nous tombe du ciel pour nous rendre un service pareil.

— N’importe, n’importe, Mayneville ; si nous sommes obligés de l’abandonner en ce moment, surveillez-le plus tard au moins.

— Eh ! Madame, plus tard, dit Mayneville, nous n’aurons plus besoin, je l’espère, de surveiller personne.

— Allons, décidément, je ne sais ce que je dis ce soir ; vous avez raison, Mayneville, je perds la tête.

— Il est permis à un général comme vous, Madame, d’être préoccupé à la veille d’une action décisive.

— C’est vrai. Voici la nuit, Mayneville, et le Valois revient de Vincennes à la nuit.

— Oh ! nous avons du temps devant nous ; il n’est pas huit heures, Madame, et nos hommes ne sont point encore arrivés, d’ailleurs.