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venu du sac de la ville. Alors l’officier commanda aux deux hommes les mieux armés de se placer sous la fenêtre de Chicot.

Lui-même, avec les trois autres, monta au logis de ce pauvre chaussetier, comme l’appelaient ses compagnons de voyage, déjà loin de la ville.

— Vous savez l’ordre ? dit l’officier. S’il ouvre, s’il se laisse fouiller, si nous trouvons sur lui ce que nous cherchons, on ne lui fera pas le moindre mal ; mais si le contraire arrive, un bon coup de dague, entendez-vous bien ? pas de pistolet, pas d’arquebuse. D’ailleurs, c’est inutile, étant quatre contre un.

On était arrivé à la porte.

L’officier heurta.

— Qui va là ? dit Chicot, réveillé en sursaut.

— Pardieu ! dit l’officier, soyons rusé. Vos amis, les épiciers, lesquels ont quelque chose d’important à vous communiquer, dit-il.

— Oh ! oh ! fit Chicot, le vin d’hier vous a bien grossi la voix, mes épiciers.

L’officier adoucit sa voix, et dans le diapason le plus insinuant :

— Mais ouvrez donc, cher compagnon et confrère.

— Ventre de biche ! comme votre épicerie sent la ferraille ! dit Chicot.

— Ah ! tu ne veux pas ouvrir ! cria l’officier impatienté ; alors sus, enfoncez la porte !

Chicot courut à la fenêtre, la tira à lui, et vit en bas les deux épées nues.

— Je suis pris ! s’écria-t-il.

— Ah ! ah ! compère, dit l’officier qui avait entendu le bruit de la fenêtre qui s’ouvrait, tu crains le saut périlleux, tu as raison. Allons, ouvre-nous, ouvre !

— Ma foi ! non, dit Chicot ; la porte est solide, et il me viendra du renfort quand vous ferez du bruit.