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duc d’Anjou, laquelle, ayant constamment côtoyé l’illustre chemin des royautés, est pleine de ces événements tantôt sombres tantôt éclatants, qu’on ne remarque d’habitude que dans les existences royales.

Traçons donc en quelques mots l’histoire de cette existence. Il avait vu son frère Henri III embarrassé dans sa querelle avec les Guise et il s’était allié aux Guise ; mais bientôt il s’était aperçu que ceux-ci n’avaient d’autre but réel que celui de se substituer aux Valois sur le trône de France. Il s’était alors séparé des Guise ; mais, comme on l’a vu, ce n’était pas sans quelque danger que cette séparation avait eu lieu, et Salcède, roué en Grève, avait prouvé l’importance que la susceptibilité de MM. de Lorraine attachait à l’amitié de M. d’Anjou. En outre, depuis longtemps déjà, Henri III avait ouvert les yeux, et un an avant l’époque où cette histoire commence, le duc d’Alençon, exilé ou à peu près, s’était retiré à Amboise.

C’est alors que les Flamands lui avaient tendu les bras. Fatigués de la domination espagnole, décimés par le proconsulat du duc d’Albe, trompés par la fausse paix de don Juan d’Autriche, qui avait profité de cette paix pour reprendre Namur et Charlemont, les Flamands avaient appelé à eux Guillaume de Nassau, prince d’Orange, et l’avaient fait gouverneur général du Brabant.

Un mot sur ce nouveau personnage, qui a tenu une si grande place dans l’histoire, et qui ne fera qu’apparaître chez nous.

Guillaume de Nassau, prince d’Orange, avait alors cinquante à cinquante et un ans ; fils de Guillaume de Nassau, dit le Vieux, et de Julienne de Stolberg, cousin de ce René de Nassau tué au siège de Saint-Dizier, ayant hérité de son titre de prince d’Orange, il avait été, tout jeune encore, nourri dans les principes les plus sévères de la réforme, il avait, disons-nous, tout jeune encore, senti sa valeur et mesuré la grandeur de sa mission. Cette mission, qu’il croyait avoir