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Le serviteur au front chauve allait et venait d’une chambre à l’autre, portant çà et là des objets empaquetés qu’il enfermait dans une caisse de voyage.

Ces premiers préparatifs terminés, il chargea un pistolet et fit jouer dans sa gaîne de velours un large poignard ; puis il le suspendit, à l’aide d’un anneau, à la chaîne qui lui servait de ceinture, à laquelle il attacha, en outre, son pistolet, un trousseau de clefs et un livre de prières relié en chagrin noir.

Tandis qu’il s’occupait ainsi, un pas léger comme celui d’une ombre effleurait le plancher du premier étage et glissait le long de l’escalier.

Tout à coup une femme pâle et pareille à un fantôme, sous les plis de son voile blanc, apparut au seuil de la porte, et une voix, douce et triste comme un chant d’oiseau au fond d’un bois, se fit entendre.

— Remy, dit cette voix, êtes-vous prêt ?

— Oui, Madame, et je n’attends plus, à cette heure, que votre cassette pour la joindre à la mienne.

— Croyez-vous donc que ces boîtes seront facilement chargées sur nos chevaux ?

— J’en réponds, Madame ; d’ailleurs, si cela vous inquiète le moins du monde, nous pouvons nous dispenser d’emporter la mienne : n’ai-je point là-bas tout ce qu’il me faut ?

— Non, Remy, non, sous aucun prétexte je ne veux que vous manquiez du nécessaire en route ; et puis, une fois là-bas, le pauvre vieillard étant malade, tous les domestiques seront occupés autour de lui. Oh ! Remy, j’ai hâte de rejoindre mon père ; j’ai de tristes pressentiments, et il me semble que depuis un siècle je ne l’ai pas vu.

— Cependant, Madame, dit Remy, vous l’avez quitté il y a trois mois, et il n’y a pas entre ce voyage et le dernier plus d’intervalle qu’entre les autres.

— Remy, vous qui êtes si bon médecin, ne m’avez-vous