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tions nos compliments, dit Perducas de Pincorney d’une voix avinée, et trébuchant derrière Sainte-Maline sur la dernière marche de l’escalier.

— Et quels sont ces amis, voyons ? dit Sainte-Maline.

— Oui, voyons-les, voyons-les, cria Eustache de Miradoux.

La bonne hôtesse, espérant toujours prévenir une collision qui pouvait, tout en honorant le Fier Chevalier, faire le plus grand tort au Rosier d’Amour, monta au milieu des rangs pressés des gentilshommes, et glissa tout bas le nom d’Ernauton à l’oreille de son agresseur.

— Ernauton ! répéta tout haut Sainte-Maline, pour qui cette révélation était de l’huile au lieu d’eau jetée sur le feu, Ernauton ! ce n’est pas possible.

— Et pourquoi cela ? demanda madame Fournichon.

— Oui, pourquoi cela ? répétèrent plusieurs voix.

— Eh parbleu ! dit Sainte-Maline, parce qu’Ernauton est un modèle de chasteté, un exemple de continence, un composé de toutes les vertus. Non, non, vous vous trompez, dame Fournichon, ce n’est point M. de Carmainges qui est enfermé là-dedans.

Et il s’approcha vers la seconde porte, pour en faire autant qu’il en avait fait de la première, quand tout à coup cette porte s’ouvrit, et Ernauton parut debout sur le seuil, avec un visage qui n’annonçait point que la patience fût une de ces vertus qu’il pratiquait si religieusement, au dire de Sainte-Maline.

— De quel droit monsieur de Sainte-Maline a-t-il brisé cette première porte ? demanda-t-il ; et, ayant déjà brisé celle-là, veut-il encore briser celle-ci ?

— Eh ! c’est lui en réalité, c’est Ernauton ! s’écria Sainte-Maline ; je reconnais sa voix, car, quant à sa personne, le diable m’emporte si je pourrais dire dans l’obscurité de quelle couleur elle est.

— Vous ne répondez pas à ma question, Monsieur, réitéra Ernauton.