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Ernauton devint pourpre.

— Qu’enfin, porteur d’un message de mon frère Mayenne, vous êtes venu chez moi, et que je vous ai trouvé fort à mon goût.

— Madame, Madame, je ne pense pas cela, Dieu m’en garde !

— Et vous avez tort, répliqua la dame en se retournant vers Ernauton pour la première fois, et en arrêtant sur ses yeux deux yeux flamboyants sous le masque, tandis qu’elle déployait, sous le regard haletant du jeune homme, la séduction d’une taille cambrée, se profilant en lignes arrondies et voluptueuses sur le velours des coussins.

Ernauton joignit les mains.

— Madame ! Madame ! s’écria-t-il, vous raillez-vous de moi ?

— Ma foi, non ! reprit-elle du même ton dégagé ; je dis que vous m’avez plu, et c’est la vérité.

— Mon Dieu !

— Mais, vous-même, n’avez-vous pas osé me déclarer que vous m’aimiez.

— Mais quand je vous ai déclaré cela, je ne savais pas qui vous étiez, Madame, et maintenant que je le sais, oh ! je vous demande bien humblement pardon.

— Allons, voilà maintenant qu’il déraisonne, murmura la dame avec impatience. Mais restez donc ce que vous êtes, Monsieur, dites donc ce que vous pensez, ou vous me ferez regretter d’être venue.

Ernauton tomba à genoux.

— Parlez, Madame, dit-il, parlez, que je me persuade que tout ceci n’est point un jeu, et peut-être oserai-je enfin vous répondre.

— Soit. Voici mes projets sur vous, dit la dame en repoussant Ernauton, tandis qu’elle arrangeait symétriquement les plis de sa robe. J’ai du goût pour vous, mais je ne vous connais pas encore. Je n’ai pas l’habitude de résis-