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qui étincela sous un rayon de la lune glissant en ce moment entre deux nuages.

Le plumet rouge resta immobile.

— On dirait, Monsieur, répliqua-t-il en haussant les épaules, que vous n’avez jamais mis une lame hors du fourreau, tant vous vous hâtez de la faire sortir contre quelqu’un qui ne se défend pas.

— Non, mais qui se défendra, je l’espère.

Le plumet rouge sourit avec une tranquillité qui doubla l’irritation de son adversaire.

— Pourquoi cela ? et quel droit avez-vous de m’empêcher de me promener dans la rue ?

— Pourquoi vous y promenez-vous, dans cette rue ?

— Parbleu, la belle demande ! parce que cela me plaît.

— Ah ! cela vous plaît ?

— Sans doute ; vous vous y promenez bien, vous ! avez-vous licence du roi de fouler seul le pavé de la rue de Bussy ?

— Que j’aie licence ou non, peu importe.

— Vous vous trompez ; il importe beaucoup, au contraire ; je suis fidèle sujet de Sa Majesté, et ne voudrais point lui désobéir.

— Ah ! vous raillez, je crois !

— Quand cela serait ? vous menacez bien, vous !

— Ciel et terre ! Je vous dis que vous me gênez, Monsieur, et que si vous ne vous éloignez point de bonne volonté, je saurai bien, moi, vous éloigner de force.

— Oh ! oh ! Monsieur, c’est ce qu’il faudra voir.

— Eh ! morbleu ! c’est ce que je vous dis depuis une heure ; voyons.

— Monsieur, j’ai particulièrement affaire dans ce quartier-ci. Vous voilà donc prévenu. Maintenant, si c’est chez vous un absolu désir, j’échangerai volontiers une passe d’épée ; mais je ne m’éloignerai pas.

— Monsieur, dit le plumet blanc en faisant siffler son épée et en rassemblant ses deux pieds, comme un homme