Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 2.djvu/197

Cette page a été validée par deux contributeurs.

est au palais, et que vous menacez d’en être atteinte. Cependant, moi, s’il en est temps encore, je vous emmènerai au Mas-d’Agenois, qui est une maison fort écartée du roi, mon mari ; nous serons là seules ou à peu près ; le roi, de son côté, part avec sa suite pour une chasse, qui, dit-il, doit le retenir plusieurs jours dehors ; nous ne sortirons du Mas-d’Agenois qu’après votre délivrance.

— Madame, Madame ! s’écria la Fosseuse, pourpre à la fois de honte et de douleur, si vous ajoutez foi à tout ce qui se dit sur mon compte, laissez-moi misérablement mourir.

— Vous répondez mal à ma générosité, Mademoiselle, et vous comptez aussi par trop sur l’amitié du roi, qui m’a priée de ne pas vous abandonner.

— Le roi !… le roi aurait dit ?…

— En doutez-vous, quand je parle, Mademoiselle ? Moi, si je ne voyais les symptômes de votre mal réel, si je ne devinais, à vos souffrances, que la crise approche, j’aurais peut-être foi en vos dénégations.

Dans ce moment, comme pour donner entièrement raison à la reine, la pauvre Fosseuse, terrassée par les douleurs d’un mal furieux, retomba livide et palpitante sur son lit.

Marguerite la regarda quelque temps sans colère, mais aussi sans pitié.

— Faut-il toujours que je croie à vos dénégations, Mademoiselle ? dit-elle enfin à la pauvre fille, quand celle-ci put se relever, et montra, en se relevant, un visage si bouleversé et si baigné de larmes, qu’il eût attendri Catherine elle-même.

En ce moment, et comme si Dieu eût voulu envoyer du secours à la malheureuse enfant, la porte s’ouvrit, et le roi de Navarre entra précipitamment.

Henri, qui n’avait point pour dormir les mêmes raisons que Chicot, n’avait pas dormi, lui.

Après avoir travaillé une heure avec Mornay, et avoir