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vant d’Aubiac, jeté un regard à droite, un regard à gauche, un regard devant, un regard derrière, et reconnu toutes les localités.

Une antichambre, un corridor, un escalier, puis, au bas de cet escalier, la cour.

Mais Chicot n’eut pas plus tôt fait quatre pas dans l’antichambre qu’il heurta quelque chose qui se dressa aussitôt.

Ce quelque chose était un page couché sur la natte en dehors de la chambre, et qui, réveillé, se mit à dire :

— Eh ! bonsoir, monsieur Chicot, bonsoir !

Chicot reconnut d’Aubiac.

— Eh ! bonsoir, monsieur d’Aubiac, dit-il ; mais écartez-vous un peu, s’il vous plaît, j’ai envie de me promener.

— Ah ! mais, c’est qu’il est défendu de se promener la nuit dans le château, monsieur Chicot.

— Pourquoi cela, s’il vous plaît, monsieur d’Aubiac ?

— Parce que le roi redoute les voleurs et la reine les galants.

— Diable !

— Or, il n’y a que les voleurs et les galants pour se promener la nuit, au lieu de dormir.

— Cependant, cher monsieur d’Aubiac, dit Chicot avec son plus charmant sourire, je ne suis ni l’un ni l’autre, moi, je suis ambassadeur et ambassadeur très-fatigué d’avoir parlé latin avec la reine et soupé avec le roi ; car la reine est une rude latiniste, et le roi un rude buveur ; laissez-moi donc sortir, mon ami, car j’ai grand désir de me promener.

— Dans la ville, monsieur Chicot ?

— Oh ! non, dans les jardins.

— Peste ! dans les jardins, monsieur Chicot, c’est encore bien plus défendu que dans la ville.

— Mon petit ami, dit Chicot, c’est un compliment à vous faire, vous êtes d’une vigilance bien grande à votre âge. Vous n’avez donc rien qui vous occupe ?