Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 2.djvu/148

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Allons, allons, doucement, ma mie, dit le roi. Sur ma parole, vous feriez scandale avec ces exclamations, et je ne sais vraiment point si le scandale que vous feriez ne réjouirait point la cour de France, car, dans cette lettre du roi mon beau-frère, que Chicot m’a récitée, il y avait Quotidiè scandalum, c’est-à-dire, pour un triste humaniste comme moi, quotidiennement scandale.

Marguerite fit un mouvement.

— On n’a pas besoin de savoir le latin pour cela, continua Henri, c’est presque du français.

— Mais, sire, à qui s’appliqueraient ces paroles ? demanda Marguerite.

— Ah ! voilà ce que je n’ai pu comprendre. Mais vous qui savez le latin, vous m’aiderez quand nous en serons là, ma mie.

Marguerite rougit jusqu’aux oreilles, tandis que, la tête baissée, la main en l’air, Henri avait l’air, de chercher naïvement à quelle personne de sa cour le quotidiè scandalum pouvait s’appliquer.

— C’est bien, Monsieur, dit la reine, vous voulez, au nom de la concorde, me pousser à une démarche humiliante ; au nom de la concorde, j’obéirai.

— Merci, ma mie, dit Henri, merci.

— Mais cette visite, Monsieur, quel sera son but ?

— Il est tout simple, Madame.

— Encore faut-il qu’on me le dise, puisque je suis assez naïve pour ne point le deviner.

— Eh bien, vous trouverez Fosseuse au milieu des filles d’honneur, couchant dans leur chambre. Ces sortes de femelles, vous le savez, sont si curieuses et si indiscrètes, qu’on ne sait à quelle extrémité Fosseuse va être réduite.

— Mais elle craint donc quelque chose ? s’écria Marguerite, avec un redoublement de colère et de haine ; elle veut donc se cacher ?

— Je ne sais, dit Henri. Ce que je sais, c’est qu’elle a besoin de quitter la chambre des filles d’honneur.