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avez craint qu’elle ne se perdît ou qu’on ne vous la volât ?

— Voilà le vrai, Madame ; maintenant, que Votre Majesté m’excuse, mais la lettre était écrite en latin.

— Oh ! très-bien ! s’écria la reine : vous savez que je sais le latin.

— Et le roi de Navarre, demanda Chicot, le sait-il ?

— Cher monsieur Chicot, répondit Marguerite, il est fort difficile de savoir ce que sait ou ne sait pas le roi de Navarre.

— Ah ! ah ! fit Chicot, heureux de voir qu’il n’était pas le seul à chercher le mot de l’énigme.

— S’il en faut croire les apparences, continua Marguerite, il le sait fort mal, car jamais il ne comprend, ou du moins ne semble comprendre, quand je parle en cette langue avec quelqu’un de la cour.

Chicot se mordit les lèvres.

— Ah diable ! fit-il.

— Lui avez-vous dit cette lettre ? demanda Marguerite.

— C’était à lui qu’elle était adressée.

— Et a-t-il paru la comprendre ?

— Deux mots seulement.

— Lesquels ?

Turennius et Margota.

Turennius et Margota ?

— Oui, ces deux mots se trouvent dans la lettre.

— Alors qu’a-t-il fait ?

— Il m’a envoyé vers vous. Madame.

— Vers moi ?

— Oui, en disant que cette lettre paraissait contenir des choses trop importantes pour la faire traduire par un étranger, et qu’il valait mieux que ce fût vous, qui étiez la plus belle des savantes et la plus savante des belles.

— Je vous écouterai, monsieur Chicot, puisque c’est l’ordre du roi que je vous écoute.

— Merci, Madame : où plaît-il à Votre Majesté que je parle ?