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— Où ?

— Cette plume rouge !

— Ventrebleu ! Madame.

— Quoi ?

— Cette plume rouge !…

— Eh bien ?

— C’est M. d’Épernon ! M. d’Épernon, l’épée à la main.

— On lui a laissé son épée ?

— Par la mort ! il commande.

— À nos gens ? Il y a donc trahison ?

— Eh ! Madame, ce ne sont pas nos gens.

— Vous êtes fou, Mayneville.

En ce moment Loignac, à la tête du premier peloton des quarante-cinq, brandissant une large épée, cria :

— Vive le roi !

— Vive le roi ! répondirent avec leur formidable accent gascon les quarante-cinq dans l’enthousiasme.

La duchesse pâlit et tomba sur le rebord de la croisée, comme si elle allait s’évanouir.

Mayneville, sombre et résolu, mit l’épée à la main. Il ignorait si, en passant, ces hommes n’allaient pas envahir la maison.

Le cortège avançait toujours comme une trombe de bruit et de lumière. Il avait atteint Bel-Esbat, il allait atteindre le prieuré.

Borromée fit trois pas en avant. Loignac poussa son cheval droit à ce moine, qui semblait sous sa robe de laine lui offrir le combat.

Mais Borromée, en homme de tête, vit que tout était perdu, et prit à l’instant même son parti.

— Place ! place ! cria rudement Loignac, place au roi !

Borromée, qui avait tiré son épée sous sa robe, remit sous sa robe son épée au fourreau.

Gorenflot, électrisé par les cris, par le bruit des armes, ébloui par le flamboiement des torches, étendit sa dextre