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ment l’attendre à la porte de la prison, il ne daigna pas jeter un regard sur elle, et s’enfuit en donnant le bras à une autre femme de mauvaise vie, avec laquelle, selon les us des voleurs, devenus ses compagnons, il avait entretenu une correspondance galante pour tromper les ennuis de sa captivité.

Millette fut atterrée de ce nouveau trait.

Revenue chez elle, elle songea à retourner auprès de sa mère ; une lettre cachetée de noir lui apprit, en ce moment même, que sa mère venait de mourir.

La pauvre jeune femme était désormais seule sur la terre. M. Coumbes, son ami, la consola du mieux qu’il put. Mais, si fort son ami qu’il fût, il ne songeait pas à aller au-devant de toutes les douleurs de la jeune femme, à lui épargner l’aveu de celle qui devenait chaque jour la plus cuisante, celle de la misère. Cette misère était grande ; mais Millette était courageuse ; elle la supporta longtemps avec cette énergie patiente qu’elle avait mise à soutenir les débordements de son mari. Enfin, l’ouvrage venant à lui manquer complètement, Millette avoua, à son bon voisin, qu’elle était réduite à chercher une condition.

Celui-ci réfléchit longtemps, regarda plusieurs fois son secrétaire en bois de noyer, sur lequel il ne laissait jamais la clef, puis déclara à Millette avec un