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fait le véritable historien, nous devons avouer que ce n’était pas à la pauvre mère que ce soupir s’adressait, mais bien à une armoire dans laquelle Millette serrait les provisions dont elle conservait les clefs dans sa poche, et que M. Coumbes, depuis quelques instants, regardait avec des yeux pleins de concupiscence.

M. Coumbes n’était ému ni du malheur de Marius, ni de celui de Millette ; M. Coumbes avait faim. Il demeura pendant quelques instants combattu entre le besoin qui lui tiraillait l’estomac et le sentiment de respect qu’inspire le malheur.

En d’autres circonstances, la lutte n’eut pas été douteuse, et l’appétit de M. Coumbes eut triomphé de toute considération étrangère ; mais son âme était en voie notoire d’amélioration ; il demeura près d’une demi-heure auprès de Millette, attendant qu’elle sortît de cet état de torpeur ; mais, enfin voyant sa patience aussi inutile que l’avaient été ses instances, il prit, à son grand regret, le parti de s’aller coucher sans souper.

Bien lui avait pris, au reste, de se pourvoir de résignation ; car, le lendemain, lorsqu’il se leva, ce fut en vain qu’il chercha Millette dans le cabanon et dans le voisinage.

La pauvre femme avait disparu, et, en quittant la maison, elle avait, sans doute par mégarde, –