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mère, moi aussi, j’ai mon secret, et vous ne sauriez croire combien il me pèse parce que je ne puis le partager avec vous. Mais il arrivera ce qui pourra, je vais vous le dire, vous le confier, pour vous donner l’exemple, pour que vous ne craigniez plus de compter sur la discrétion ou sur la tendresse de votre fils.

Millette écoutait ce dernier sans l’entendre ; l’expression de son amour filial arrivait à ses oreilles comme une musique harmonieuse qui lui causait de douces sensations ; mais le désordre de ses idées était si grand, qu’elle ne cherchait pas le sens de ses paroles.

– Mon enfant ! mon cher enfant ! s’écria-t-elle, jure-moi que, quoi qu’il arrive, tu ne maudiras pas ta mère ; jure-moi que, si tu la juges, si tu la condamnes, ton amour la défendra ; jure-moi qu’il me restera ton amour, qui est mon seul bien à moi ; je ne l’ai jamais senti comme aujourd’hui qu’il est menacé. Je voudrais être morte ! mon Dieu ! je voudrais être morte ! Mourir, qu’est-ce que cela ! mais perdre l’affection de celui que vos entrailles ont porté, qui s’est nourri de votre chair, abreuvé de votre sang, ce n’est pas possible ! Non, Dieu ne saurait le permettre !… Calme-toi, Marius, je vais parler, continua la malheureuse femme, haletante et à demi-morte ; je parlerai ; puisqu’il est impossible que tu cesses de m’aimer, je parlerai !