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s’humiliait à son égard, l’ex-portefaix se hâtait de gagner le large ; mais la houle restait si forte, qu’il suait sang et eau pour remuer sa bête. Ces sortes de bateaux à fond plat étant fort lourds, ce n’était qu’au prix d’une courbature qu’il parvenait à gagner son poste favori.

Un jour M. Coumbes eut une idée, et il attendit patiemment le dimanche, seul jour où il lui fût possible de la mettre à exécution.

Cette idée, ce n’était pas moins que de renoncer à goûter solitairement ses plaisirs, que d’embaucher Marius dans la grande confrérie des pêcheurs à la ligne.

Un jeune homme fort et vigoureux devait faire merveille sur les avirons. Avec son aide, M. Coumbes se promettait de braver vents et tempêtes, et se croyait certain de conquérir tout au moins une bouillabaisse hebdomadaire tant que durerait le mauvais temps.

Le samedi soir, lorsque le fils de Millette arriva au cabanon, il paraissait si satisfait et si joyeux que M. Coumbes en fut surpris. L’idée ne lui vint pas d’attribuer le bonheur qui se lisait sur la physionomie de son filleul à autre chose que la proposition qui allait lui être présentée, et, comme M. Coumbes avait gardé un secret profond sur ses projets, il s’étonnait de la puissance des pressentiments qui avait