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pu un instant m’abuser sur ton compte. Tu prends parti pour mes ennemis ; reste avec eux, sors de chez moi, malheureux ! va ! espère que pendant vingt ans, comme moi, ils te donneront le pain de chaque jour ! Va-t’en près de ceux que tu me préfères. D’ailleurs, qu’ai-je besoin de toi ? Ne suis-je pas un homme, moi ! et un homme qui, quoique vieux, saura se faire respecter et châtier ceux qui l’offensent ?… Ah ! ah ! ah ! continua l’ex-portefaix avec une sorte de rire convulsif, qu’ils n’espèrent pas que les simagrées de leur perruche me feront manquer à mes devoirs !

M. Coumbes était au bout de ses forces. Si sa colère était d’autant plus violente que les accès en étaient plus rares chez lui, son paroxysme devait plus promptement l’accabler ; il ne prononça sa dernière phrase qu’avec effort ; les derniers mots en étaient tout à fait inintelligibles. Il s’affaissa sur le lit contre lequel il s’appuyait ; ses lèvres bleuirent tandis que son visage devenait d’une pâleur livide, et il tomba suffoqué sur son matelas.

Les éclats de voix de M. Coumbes avaient depuis quelque temps déjà attiré Millette ; plus morte que vive, elle écoutait au dehors ; au cri que poussa Marius lorsqu’il vit l’ancien portefaix s’affaisser sur lui-même, elle entra et s’empressa de donner des soins à son maître.