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cher monsieur : ce fait n’a pas été inséré par moi, je ne le connaissais pas ; mais vous avez, par votre démarche, attiré mon attention sur ce fait, elle s’y cramponne ; il subsistera donc jusqu’à ce qu’il soit démenti ou confirmé par qui de droit.

— Monsieur, dit Albert en se levant, je vais donc avoir l’honneur de vous envoyer mes témoins ; vous discuterez avec eux le lieu et les armes.

— Parfaitement, mon cher monsieur.

— Et ce soir, s’il vous plaît, ou demain au plus tard, nous nous rencontrerons.

— Non pas ! non pas ! Je serai sur le terrain quand il le faudra, et, à mon avis (j’ai le droit de le donner, puisque c’est moi qui reçois la provocation) ; et, à mon avis, dis-je, l’heure n’est pas encore venue. Je sais que vous tirez très bien l’épée, je la tire passablement ; je sais que vous faites trois mouches sur six, c’est ma force à peu près ; je sais qu’un duel entre nous sera un duel sérieux, parce que vous êtes brave et que… je le suis aussi. Je ne veux donc pas m’exposer à vous tuer ou à être tué moi-même par vous, sans cause. C’est moi qui vais à mon tour poser la question et ca-té-go-ri-que-ment.

Tenez-vous à cette rétractation au point de me tuer si je ne la fais pas, bien que je vous aie dit, bien que je vous répète, bien que je vous affirme sur l’honneur que je ne connaissais pas le fait ; bien que je vous déclare enfin qu’il est impossible à tout autre qu’à un don Japhet comme vous de deviner M. le comte de Morcerf sous ce nom de Fernand ?

— J’y tiens absolument.

— Eh bien ! mon cher monsieur, je consens à me couper la gorge avec vous, mais je veux trois semaines ; dans trois semaines vous me retrouverez pour vous dire :